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Coke en stock (CXCIV) : la découverte et la chute des fournisseurs d’avions (29)

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Le faux coup d’Etat en Bolivie, expliqué hier, fomenté par des opposants liés à des groupes extrémistes hongrois nous force quelque peu à aller chercher un peu plus loin dans des archives ce qui pourrait expliquer cette dissidence particulière et manipulable comme on vient de le voir.  Pour cela, il faut se plonger dans quelques ouvrages plein d’enseignements, et s’intéresser de près à un autre cas pendable, celui de l’assassinat gratuit d’un naturaliste, qui avait révélé surtout la présence armée de narco-trafiquants dans un nombre importants de sites comportant des pistes d’atterrissage.  Et tout un système instauré du temps de Banzer, ses généraux les plus proches étant les pires narco-trafiquants de l’époque.  La Bolivie, en réalité est toujours malade, intoxiquée par ce très lourd héritage dont elle ne peut se défaire…

Retour historique avec un peu de littérature à la clé

Pour cela il nous faut revenir quelques années plus tôt au pays… et au trafic de drogue, étroitement lié à la politique on le sait en Bolivie, avec, pour nous aider, un peu de littérature.  Un premier ouvrage indispensable nous explique les attenants et les aboutissants de cette mafia de la coke en Bolivie dans les années 90; là où en fait tout à démarré, y compris le trafic aérien, c’est ça le point fondamental.  Un phénomène qui perdure et auquel a dû se confronter Evo Morales, à se demander aujourd’hui si sa décision d’interdire le territoire aux agents de la DEA américaine n’est pas le fait d’une pression de ces trafiquants ou de leurs descendants…  C’est le livre « Bolivia and Coca: A Study in Dependency » de James Painter, paru en 1994 (ici à droite) qui nous éclaire sur la question.  Selon James Painter, les têtes d’affiche du trafic dans les années 80 en Bolivie étaient, je cite, Bismarck Barrientos, Gerardo « Yayo » Rodriguez, William Pato Pizarro, et Hugo Rivero Villavicencio, tous alors étaient des collaborateurs de Jorge Roca Suarez, alias « Tête en paille » (car il se teignait les cheveux en blond). Ensemble, ils formaient le clan de Los Techos.  Le frère de Roca, Jose Luis Roca Suarez s’était fait arrêter, fait remarquer Painter, un nombre incalculable de fois dans le Chapare… et s’en était sorti le même nombre de fois :  cet homme bénéficiait de protections en haut lieu (celles du gouvernement Banzer, donc).  Selon Painter, la DEA demandera la tête, pour les extrader, de trois membres de la famille : la mère de Roca (Blanca Suarez de Roca) son frère, Rafael et leur sœur Asunta Beatriz, sans les obtenir.  « Tête de paille » était lui le leader du clan de Santa Ana, qui comportait Hugo Rivero Villacencio, un fermier au ranch immense, et un chanteur nationalement connu, Oscar Roca Vasquez (genre larmoyant, photo à gauche lors d’un show TV, on peut l’entendre ici) qui était aussi le cousin de Jorge Roca Suarez.  A l’évidence, le groupe trafiquait avant tout par voie aérienne.  « Techo de Paja » s’était déjà entouré de pilotes, notamment d’Erwin Guzman, qui avait la particularité d’être un ancien officier de la Fuerza Aérea Boliviana, formée on le sait sur les Cessna achetés par Banzer.  Le clan avait des liens avec les Cartels de Medelin et de Cali, dont ils distribuaient la production avec leurs avions.  Selon la DEA américaine, la réputation du clan de Santa Ana était celle du plus violent gang existant, le plus acharné à produire de la coke, mais aussi le plus entreprenant, cherchant à en diversifier la distribution en se tournant directement vers les USA, mais aussi vers l’Europe (déjà !!!) :  en somme, ils voyaient plus loin déjà que les Colombiens :  ils avaient compris que le tout n’était pas de produire uniquement.  Un raid en 1991 (décrit ici) avec force hélicoptères et hommes en armes s’attaquera au réseau, raid qui se soldera par la saisie 17 petits avions, pas moins, utilisés pour transporter de la cocaïne, dans une première phase, et de 18 autres avions trouvés à l’aéroport de Santa Ana et qui étaient été utilisés pour le même trafic.  En 1991, on en était déjà à ce qui est à nouveau décrit en 2014, 2015, 2016, 2017 (les dates des « visites «  des hangars de narco-avions) !!!  Cela fait bientôt trente ans que c’est ainsi dans le secteur, à croire que rien n’a bougé depuis !!!  Pire, ça a même surtout augmenté !!!  Or, en 1982, la DEA estimait déjà la production de cocaïne de Suarez à une tonne de pâte de cocaïne par mois (équivalent à entre 5 et 9 millions de dollars par mois), et sa production annuelle estimée plutôt à vingt tonnes !  Ses laboratoires clandestins étant dispersés à Yepacaní, Puerto Villaroel et dans la zone de Portezuelo (tous dans la région du Beni), tout étant dirigés depuis Santa Cruz.  L’Histoire, en ce sens est implacable :  le trafic n’a donc jamais cessé depuis !!!

L’assassinat gratuit du naturaliste

Des trafiquants prêts à tout, et surtout à ne pas se laisser envahir, ou se laisser déranger pendant leurs malversations.  Même sous Victor Paz Estenssoro, qui avait été chassé par un coup d’Etat militaire le  et était revenu en 1985 au pouvoir une troisième fois (Banzer ayant pris le pouvoir une première fois le 22 août  jusqu’au … Un épisode patent de cette notion de territoire leur appartenant est celle, désolante, de la mort de Noel Kempff Mercado (ici à la droite de la photo en train, de donner des explications à ses chercheurs).  Le 5 septembre 1986, ce naturaliste de renom s’était aventuré à environ 750 kilomètres au nord de Santa Cruz en pleine jungle dans la région d’Huancahaca.  Il volait alors au dessus d’une région riche d’espèces naturelles, réputé pour ses orchidées, ses broméliacées, ses passiflores, les superbes heliconias, et les araceae  Ce jour-là, son avion distingue au sol un endroit pour atterrir sur le plateau de Caparú.  Manque de chance, pour lui, c’est une piste jalousement protégée par les narco-trafiquants.   C’était aussi un emplacement connu et ancien, bien répertorié, créé en fait par deux industriels allemands en 1912 désireux d’y exploiter le boom du moment du caoutchouc naturel (hévéa).  Le terrain possède un nouveau propriétaire, qui s’appelle... Roberto Suárez !!!   Or, surprise encore, le terrain, il l’a hérité d’un autre personnage sulfureux :  il avait été offert par Banzer à celui qui était pressenti pour devenir son dauphin :  Juan Pereda Asbún, qui avait hérité de ces  7200 hectares situés dans le nord-est de Santa Cruz.  C’était bien celle d’Huanchaca !!!  Kempff, selon un témoignage, n’aura que le temps de dire « Nous sommes des gens de paix, nous arrivons à une mission scientifique et nous ne sommes pas des policiers. »  Il est alors abattu par un tireur localisé dans la tour de guet surveillant la piste : les narco-trafiquants avaient pris le contrôle de l’ancienne piste et se l’étaient appropriée en la défendant contre quiconque mettait les pieds dessus !!!

Son pilote, Juan Cochamanidi, subit le même sort tentant de fuir à travers les bois, mais Vicente Castelló, un scientifique espagnol, réussit à s’échapper ; c’est lui le témoin primordial, qui a tout vu.  Il réussira à se cacher puis à entrer un contact avec un autre avion qui le ramènera à bon port à Santa Cruz.  Contrairement à ce qu’on attendait, le gouvernement fera tout pour ralentir l’enquête, retenant sous des prétextes les hélicoptères pouvant se rendre sur place pour enquêter (ce qui n’est pas sans rappeler ici l’attitude d’ATT au Mali dès qu’il avait appris le crash du Boeing 727 à l’origine de toute cette saga…).  Le temps qu’ils débarquent, les installations ont déjà été démantelées !!!   Une enquête plus tardive démontrera l’énorme responsabilités des militaires, des policiers et des membres du gouvernement de Victor Paz Estenssoro pour couvrir l’incident de Caparú, sur les terres de Roberto Suárez, qui bénéficiait donc d’une grande mansuétude en haut lieu.  Les narcos étaient trop puissants pour pouvoir être inquiétés !!!  Depuis, l’endroit où a été tué Mercado, pas loin de la superbe chute d’eau appelée Arco Iris, haute de 80 m, est devenu un parc portant son nom.  En 2015, le vice-président de l’Etat, Álvaro García Linera, visitant le parc, a décidé une surveillance plus grande du secteur:  on le voit ici (photo de droite au début du chapitre) visiter les vestiges d’un avion qui s’y était écrasé… un avion de trafiquants, très certainement, à l’immatriculation brésilienne en auto-collant.  On peut en effet s’y poser (des visites touristiques comme celle ici à droite utilisant les pistes de terre disséminées dans le parc) !  L’avion étant ici le CP-1895, un Cessna U206G (U20606772) appartenant à Ramon Venegas d’Este, dont les plus curieux auront remarqué le Venturi sur le côte gauche… Le 5 février 2016, il a été annoncé comme étant l’un des 137 avions à avoir son immatriculation révoquée… par la DGAC.  Des avions tous soupçonnés d’avoir participé au trafic de drogue.

La crise qui avait suivi

La mort du naturaliste admiré dans le monde entier a provoqué des remous plus importants encore.  Pour cela, l’article remarquable de Rafael Sagarnaca d’El Pais, sorti le 3 octobre 2016 nous éclaire de façon géniale sur le séisme qu’il avait provoqué en haut-lieu.  Il affirme en effet qu’un proche du président était du côté des narcos, et que la DEA s’opposait bien à la CIA, sur le sujet : « le sommet du narco-scandale est survenu lorsque Rowell et le chef de la DEA en Bolivie, Frank Macolini, ont présenté le résultat des enquêtes américaines au président Paz Estenssoro » (ici à gauche avec Kennedy lors d’une vite aux USA le 22 octobre 1963, peu de temps avant l’assassinat de JFK). « L’ambassadeur est arrivé à Palacio Quemado avec la conciliation d’un différend difficile entre les rapports de la DEA et de la CIA.  L’agence centrale était dirigée en Bolivie par le responsable politique de l’ambassade, David Greenly.  Au Quemado Palace, seules cinq personnes ont participé à l’événement.  Outre ceux déjà mentionnés, le ministre du Plan de l’époque, Gonzalo Sánchez de Lozada (qui sera aussi président, ici à gauche), et le secrétaire de la présidence, Juan Carlos Durán, étaient présents.  Les Américains ont dit à Paz Estenssoro que parmi les personnes impliquées dans l’affaire, il y en avait une qui appartenait à l’entourage du Président.  Après avoir relu le rapport, Paz Estenssoro a pris du recul et est resté à réfléchir pendant plusieurs minutes.  Ensuite, Sánchez de Lozada a déclaré aux Américains: « Le président a l’intention de remettre le gouvernement à une junte militaire.  Il prévient que ce rapport implique une nouvelle interruption de la démocratie en Bolivie.  Au milieu de la tension générée par le président, Sánchez de Lozada a proposé une solution concertée que, finalement, l’ambassadeur Rowell a acceptée.  Le nom de la personne susmentionnée a été éliminé du rapport et Paz c’est sorti avec chance de cette crise.  Cependant, le narco-scandale a causé une perte inattendue.  Macolini, le chef de la DEA, a dit à ses supérieurs aux Etats-Unis que Rowell avait modifié le rapport.  Quelques jours plus tard, Rowell quitta la Bolivie sans donner d’autres explications.  Son poste a été occupé temporairement par David Greenly jusqu’à la fin de l’administration. »

La CIA, soutient des narcos en Bolivie : un secret d’Etat qui perdure
 
Cependant, dans le gouvernement bolivien, cette crise de fond avait semblé avoir bénéficié à certains politiciens.  Et l’auteur de citer notamment dans le lot un certain Carlos Sánchez Berzaín un avocat de renom qui est aussi, quel hasard, Directeur du très droitier Institut interaméricain pour la démocratie.… l’homme a été Ministre de gouvernement à deux reprises (1994-1996 et 1997) et également ministre de la Défense nationale (2003), sous la présidence de Gonzalo Sanchez de Lozada. « Avant de s’imposer dans les rangs du MNR (Movimiento Nacionalista Revolucionario), Sánchez Berzaín ne s’était distingué que par une activité singulière: son cabinet défendait les trafiquants de drogue liés à la dictature de Luis García Meza. Et en 1985 sa présence a été identifiée dans l’affaire « Tauro » qui a touché Jorge « Tête de paille » Roca, oui, le propriétaire de Huanchaca.  Mais même avec des narco-cas liés à leurs hôtes (comme un narco-avion de 4,5 tonnes en 1995), Sanchez n’a cessé de profiter des sympathies américaines. Le 26 juin 2002, quatre jours avant les élections présidentielles, à Chimoré, l’ambassadeur des Etats-Unis Manuel Rocha a déclaré au président Tuto Quiroga: « L’électorat bolivien doit considérer les conséquences du choix des dirigeants d’une manière ou d’une autre.  Trafic de drogue et terrorisme.   » Il avait fait allusion à Evo Morales, cherchant clairement à favoriser la candidature de Sánchez de Lozada.  Plusieurs auteurs relient Rocha au scandale Iran Contras (…) « Tête de paille », après s’être rendu aux autorités en 1993, a été extradé vers les Etats-Unis. Il est considéré parmi les anciens trafiquants de drogue qui ont réussi à se réhabiliter, presque tous en dehors du cartel de Medellín. Là, il a étudié l’architecture et le droit en prison.  Au début du deuxième gouvernement de Sánchez de Lozada, les biens saisis en Bolivie de la famille Roca Suárez lui ont été restitués. Et 30 ans après la plus grande crise bolivienne, qui n’était pas si bolivienne que cela, il n’y a eu que deux personnes seulement qui purgent des peines pour cette affaire: les deux hommes de main brésiliens qui ont tiré sur la délégation scientifique.  Et jusqu’à aujourd’hui, on ne sait toujours pas qui était cette année angoissante de 1986 l’opérateur influent de la Mega Narcofactory de Huanchaca ».  Ironie de l’affaire, le dernier ouvrage de Carlos Sánchez Berzaín, farouche opposant à Morales, s’intitule « Las Dos Américas » … dans lequel il s’en prend au socialisme en général et à Morales en particulier.  Son précédent ouvrage «  La dictadura del siglo XXI en Bolivia » est interdit de vente dans le pays.

Tout se serait écroulé en 1990 ? Pas sûr…

On ne sait si l’affaire Kempff est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, mais il faudra donc attendre la fin des années 80 en effet pour que l’empire du narco-trafiquant Suarez s’effondre (Banzer a quitté le pouvoir en 1978 (avant de revenir en 1997) :  « Le 16 décembre 1990, Jorge Suarez et son épouse Cecilia ont été arrêtés après le raid de la DEA sur leur villa de 19 chambres de Suarez à San Marino, en Californie.  Au procès, Suarez a été condamné à Los Angeles avec plus de 30 accusations différentes de stupéfiants et de trafic de drogue, et 27 accusations de blanchiment d’argent, de fraude bancaire, d’évasion fiscale et d’exportation illégale de monnaie, ce qui lui faisait risquer la prison à vie.  En décembre 1990, aux États-Unis, le juge de district Stephen V. Wilson a condamné Suarez à 30 ans de prison, tandis que sa sœur, Beatriz Asunta « Chunty » Roca, a été condamnée à cinq ans d’emprisonnement pour blanchiment d’argent.  Il a donné sa première interview à la presse le 22 mai 2016.  Dans l’interview, Suarez explique qu’il a obtenu des diplômes de droit politique et pénal après avoir suivi des cours en prison.  Sa fortune familiale et ses biens à Santa Cruz ont été saisis ». Suarez avait été le roi pendant des années, et c’est vrai qu’il s’était tout permis, certain de sa puissance.  L’auto-proclamé « patriote » « défenseur des pauvres » et « l’élevage industriel » se permettait tout, comme l’explique parfaitement Tom J. Farer dans son livre « Transnational Crime in the Americas », publié en 1999 : « lors d’un des événements les plus bizarres de l’histoire, Suarez a convoqué une émission de télévision animée par Carlos Palenque, un animateur de talk-show populaire aux aspirations politiques.  Suârez, avec Roberto Jr, il était l’un des invités à discuter de narco-vidéos.  Suârez a nié qu’il était le «roi de la cocaïne» et a dit que le roi en étaient les États-Unis, l’ambassade et le président de l’époque Victor Paz Estenssoro en étant les vice-rois » . « Le lendemain, le gouvernement a fermé les stations de télévision et de radio de Palenque, offrant par inadvertance à l’homme une plate-forme pour se présenter aux élections et pour fonder un parti politique devenu très important. Moins de deux mois plus tard, les forces de l’ordre ont arrêté Roberto Suarez dans son hacienda de Beni et l’ont emmené en prison à La Paz. Entre-temps, les trois partis politiques ont publié une déclaration affirmant que les forces internationales de trafic de drogue menaçaient de saper la démocratie bolivienne ».
Luis Arce Gomez en tête d’affiche 
Suarez tombera au final pour avoir voulu être encore plus gourmand : « Techo de Paja » est devenu la victime de sa propre cupidité.  Après avoir conclu une alliance cruciale avec les trafiquants, les militaires et les policiers mexicains, il a fait parvenir des cargaisons industrielles de cocaïne dans le sud de la Californie ».  Mais il aura fait un voyage de trop.  LE voyage de trop.  « En 1988, une opération d’infiltration de la DEA a permis au Mexique de l’approcher et, en 1990, Techo de Pajaa été arrêté à San Diego.  Lors d’une conférence de presse, le procureur général Richard Thornburgh a décrit Techo de Paja comme «le plus important trafiquant de stupéfiants en Bolivie.  Alors que beaucoup le voyaient comme un héros populaire, ses méthodes impitoyables lui ont permis de cultiver et de corrompre les fonctionnaires boliviens afin de protéger un commerce de stupéfiants qui était à la fois vaste et extrêmement meurtrier « .  Le reste du gang a suivi, et est tombé juste après lui : « Luis Arce Gomez avait déjà été arrêté en Argentine au début des années 1980.  Après y avoir purgé une année de prison, les tribunaux argentins ont rejeté les  demandes d’extradition des États-Unis. Arce Gomez a alors vécu incognito en Argentine et au Paraguay jusqu’en décembre 1989, date à laquelle il a été arrêté dans une opération conjointe de la police bolivienne et du DEA dans la ville de Santa Cruz de la Sierra, l’ancien terrain des « amis de la mort « »  (le groupe de la terreur organisé par d’anciens nazis, dont un dénommé… Klaus Barbie).  « Il a ensuite été emmené sur une piste dans le département de Cochabamba, où il a été placé dans un avion de DEA à destination de Miami.  Arce Gomez (ici à droite) a été jugé à Miami en décembre 1990 et janvier 1991 et a été reconnu coupable d’avoir conspiré pour exporter de la cocaïne aux États-Unis.  Il a été condamné à une peine de trente ans au pénitencier fédéral de Memphis.  Enfin, en juillet 1991, les derniers vestiges de l’équipe de Santa Ana ont été ciblés dans une opération militaire soutenue par les États-Unis appelée Safe Haven. Hugo Rivero Villavicencio et Winston Rodriguez, derniers dirigeants éminents du cartel, avaient disparu depuis longtemps.  Quelques semaines plus tard, cependant, le gouvernement de Jaime Paz Zamora (1989-1993) proposait un soi-disant décret de repentance qui permettait à tout le clan de Santa Ana de se rendre en échange de peines légères. Entre août et décembre 1991, sept des patrons de Santa Ana s’étaient rendus.  En fin de compte, Rivero et Rodriguez ont été condamnés à cinq ans de prison dans une prison bolivienne.  On leur avait surtout promis de ne pas être extradé aux États-Unis ».

Une villa-paravent à des activités militaires

Une autre source nous décrit l’envahissement de la villa du narco-traficant, qui dissimulait en réalité tout autre chose : « Siles Zuazo a ordonné la plus grande offensive jamais lancée contre l’empire de la drogue en Bolivie.   Six Cessna, deux hélicoptères Gavião modernes (des Lama », ou Alouette II HB 315B françaises construites sous licence au Brésil), un transporteur Hercules 130 et un Fokker camouflé avec un total de 150 hommes, se sont rendus dans le Beni, centre des activités du milliardaire Roberto Suárez. Les pilotes ne connaissaient pas l’objectif. La première était la« Villa Gata » un grand domaine de loisirs. celui de Roberto Suarez Jorge Luna. Prisma, qui a participé à l’opération, décrit la « Villa Gata »: « « Une grande clôture des combats de coqs est la première chose vue par le visiteur, entourée par des cages bien entretenues avec plus de 50 coqs.  Puis, à proximité d’un superbe jardin de belles roses, une autre cage renferme des spécimens exotiques de la jungle de Beniana:  toucans, perroquets et autres oiseaux colorés. Le léopard de Roberto Suarez n’était pas là ce jour-là dans la Villa Gata.  La maison est confortable mais sans fioritures, dans le style des agriculteurs de la région:  trois grandes chambres avec salles de bains modernes, une grande salle à manger et plusieurs locaux pour les loisirs, plein de beaux hamacs, certains portails et terrasses, nombreuses fleurs et dépendances secondaires, pour accueillir plus de 40 hommes.  Le plus énigmatique: un coffre-fort qui ne pourra jamais être ouvert. »  Mais il n’y avait pas que des fleurs à découvrir dans la villa…

« Ce même après-midi, dans des opérations similaires, la police a trouvé un camp d’entraînement paramilitaire moderne, avec un champ de tir, des tranchées, un parcours d’obstacles et un logement pour cent hommes. «  Comme le dit ici fort justement The Economist, Roberto Suarez Gomez avait surtout commis l’erreur de ne pas avoir su rester discret !  « Sa grande erreur a été de trop chercher la publicité.  Pour bénéficier de l’immunité de poursuites, les trafiquants de drogues illicites doivent être discrets.  Roberto Suarez Gomez aimait se pavaner.  C’était assez embarrassant pour ses protecteurs soudoyés en haut lieu en Bolivie quand il était surnommé le roi de la cocaïne.  Mais M. Suarez leur a rendu impossible de continuer à tolérer ses opérations quand il a affiché ses gains mal acquis sur son train de vie et sa philanthropie ostentatoire.  Il avait donné de l’argent pour les réparations d’église, pour les rues pavées dans les villages pauvres, pour les terrains de football, pour les enfants affamés dans la rue.  Dans un geste encore plus provocateur, il a proposé, de façon peu vraisemblable, de rembourser toute la dette extérieure de la Bolivie de 3 milliards de dollars si les accusations portées contre lui pour les trafics de drogue étaient abandonnées ».  En somme, il refaisait ce que de son côté faisait Pablo Escobar  (tombé en 1993) !!!   On le verra poser avec une petite partie de ses troupes en armes, alignées devant… un Cessna flambant neuf (et un autre appareil indéterminé, genre Corisco II)… difficile d’imaginer qu’avec ça il ne songeait pas à un coup d’Etat, un jour où l’autre…

 

Le journal citoyen est une tribune. Les opinions qu’on y retrouve sont propres à leurs auteurs.

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