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Coke en stock (CCCXXX) : les avions saisis l’été 2020

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On arrive donc à notre saisie annoncée. Il y a de tout, comme modèles, comme on a affaire à différents groupes et différents aérodromes : des plus petits appareils aux plus grands, c’est fou le nombre d’engins qu’ont utilisé au Brésil les trafiquants. La plus grosse prise étant un Falcon 50, denrée rare dans le secteur, qui mène au final la drogue… en Europe, via un dernier trajet par container le plus souvent !

Un rappel historique pour commencer

C’est l’Etat du Goias qui avait ouvert le bal déjà, fin 2019, en déclarant avoir mis sous séquestre la quarantaine d’avions déjà cités comme liés à João Soares Rocha, avec comme photo d’appui le petit Embraer EMB-711B Coriscoe PT-NRV aperçu ici le 1er septembre 2018 sur l’aérodrome de Canarana. Selon les registres, c’est celui d’Hilario Moacir Herter de Asa Agropecuária Santo Antônio Ltda.

Un petit aérodrome fort discret, visité par une foule de petits engins, dont le PT-WIP, un Embraer EMB-810D Seneca III repeint (ici sa vieille livrée de 2008) qui avait jadis défrayé la chronique du CPI lorsque le 7 mas 2000 vers 13 h il avait dérapé sur la piste de l’aéroport de Pindamonhangaba. L’avion, appartenant désormais à Diego Alonço Dos Reis (aux nombreux ennuis judiciaires), avait glissé sur la piste de l’aéroport de Pinda en blessant sévèrement ses passagers. Il appartenait alors à à la société Cruz de Malta et avait été loué par Dispetro, qui travaillait pour Petroforte dirigé alors par Ari Natalino da Silva. La raison de son atterrissage raté était la pluie, mais aussi.. son chargement trop lourd de cocaïne qui s’était volatilisé, juste après comme par miracle… Trois jours après le passage des députés de la CPI à Campinas, l’ancien directeur du distributeur de carburant Brasil Petro, Hipólito de Oliveira, 48 ans, était abattu de trois coups de feu à Paulínia, le début d’un long dossier mêlant vente de pétrole frelaté, mafia brésilienne et… cocaïne ! Lire ici le détail.  « en moins de dix ans, le distributeur (Petroforte) a donné naissance à plus de 200 entreprises qui, selon l’accusation, constituaient l’une des plus grandes organisations criminelles de l’histoire du pays. Parmi les crimes signalés par le député figurent également l’évasion fiscale, la falsification de documents, la mise sous séquestre, les délits de banqueroute et le détournement d’actifs ». L’aérodrome de Jetaï était le fief narco de l’époque…  A droite c’est l’un des premiers avions utilisé par les trafiquants, le Cessna Skylane PT-JTH (aujourd’hui au Centro De Uro-Nefrologia LTDA). La coke par avion au Brésil c’est une vieille histoire, qui aujourd’hui du Paraguay a rejoint la côte Est : « la police fédérale de Pernambuco a passé deux ans à surveiller les criminels en collaboration avec les autorités internationales, telles que la National Crime Agency (NCA), à Londres, et a révélé que le programme continuait de fonctionner même pendant la pandémie » peut-on lire ici.

Des petits avions d’abord

Sur l’ensemble des petits aérodromes visités dans les 13 états, en lien avec les trafiquants, on est retombé d’abord, bien sûr, sur de petits avions, tel le PT-OTJ un Mooney M20J de 1990, surpris comme utilisateur habituel de l‘Aéroclub de Santa Catarina ou de Florianopolis Hercilio Luz.  Il était entreposé en fait dans un hangar discret de Sao José Do Rio Preto, c’est le N°24-3199 ex N9130X appartenant à Porto Preguicas Resort LTDA – EPP (un hôtel).  Sur place est également incriminé un Piper Seneca à la livrée classique, resté dans son jus, lui aussi dans un état extérieur « nickel ». L’engin est en fait le PT-RBQ, 810316, remis à neuf. Retapé, car accidenté le 24 février 2004 à Manoel Urbano (AC) parti de Rio Branco.  Lors du vol une panne de moteur gauche lui avait fait perdre de l’altitude et le pilote avait choisi de faire un atterrissage d’urgence sur une piste non immatriculée connue sous le nom de « Seringal Soares ». L’avion avait touché un promontoire 60 mètres avant la piste  d »atterrissage, le train gauche touché s’effondrant; Si les passagers n’avaient été que légèrement blessés, l’avion, note le rapport « , avait subi des dommages importants. »  Il appartient à Ruan Cesar Bortolete Giacomo (décrit ici en 2014 comme un élève pilote de 17 ans). Bref, à Sao José Do Rio Preto, on faisait allègrement dans le maquillage d’avions accidentés et défoncés ! Un Beechcraft fraîchement repeint lui aussi dans un schéma inhabituel, avec un capot bleu foncé notamment est aussi visible.. sans encore d’immatriculation, encore une autre suspicion surgit (un capot foncé montre moins des dégâts ou les bosses qu’un capot blanc). L’un des rares à lui ressembler est le N58EU aperçu en Europe en 2008 et devenu brésilien en 2012 sous l’immatriculation PR-VPC acheté par VIPAVE COMERC.E LOCACAO DE VEICULOS LTDA. Mais celui-la a été repeint « new style » depuis ! Un autre petit appareil inspecté est le joli Van’s RV-9A, visible ici longuement en vidéo. L’engin du type fort prisé au Brésil comme on l’a vu, est bien l’original.  Il n’a pas été cloné celui-là et on ignore s’il a fait partie des saisies ou non. Il appartient à Dona Ema Agropecuaria e Industrie LTDA.

L’aérodrome de Sao José Do Rio Preto situé au 20°48′58″S 049°24′17″W, entre Uberlandia et Londrina, est sous suspicion depuis de années, on le sait, avec sa liste unique et ses petites installations portuaires sans trop de surveillance.  Le Mooney, malgré son âge canonique était particulièrement bien entretenu : c’est le propre de ces saisies nouvelles, qui peuvent néanmoins dissimule des avions rapiécés comme ceux retapés à Asuncion u Paraguay.  A Florianopolis, on a saisi également un  Embraer EMB-711ST Corisco Turbo de belle facture extérieure, ici à gauche, remis à neuf et repeint il y a quelque temps déjà, le PT-RYA, vu ici dans ses anciennes couleurs à Sao Paulo Campo de Marte en décembre 2011. On verra un peu plus loin à qui il appartient. Dans le lot on trouve aussi le Cessna 206  PT-CFW, de Sebastiao Da Silva Lopes, de type: U206C, N°  U2061144, dont le certificat de navigabilité avait été retiré fin 2014 mais qui, comme d’autres, présenté comme neuf grâce à une bonne couche de peinture, semblait néanmoins encore voler, sans disposer de l’autorisation nécessaire lui aussi. Un autre Cessna 210 à l’immatriculation difficilement lisible (6Y-GME, il serait jamaïcain ?) est aussi montré fugacement, dans un recoin de hangar, entouré de policiers. Un autre cliché le montre surchargé de masquage d’indentification. Pour quelle raison, on l’ignore.

Un autre « classique » est incorporé dans la saisie : il s’est fait prendre à l’extérieur celui-là: c’est le PT-RJZ, un EMB-720D dont on masque à nouveau l’immatriculation, vu ici en plein vol le 1er mars 2017 au Manaus Aeroclube de Flores, un des hauts-lieux de trafic. On remarque son petit sticker « Taxi-Aereo » au passage. Brazil Moreno Taxi Aereo LTDA – EPP dirigé par Guilherme Monteiro De Oliveira (109 procédures au compteur !). Il s’était fait attraper dans la fazenda de Nossa Senhora Aparecida, située dans dans le Mato Grosso au Park Road Smokey Falls vous avais-je dit ici. Il transportait 150 kilos de pâte de marijuana (« maconha » là bas). l’engin était piloté par Daniel Dias Moreno, qui est associé-propriétaire de la compagnie de taxi aérien Amazonas Air Club et qui avait raconté avoir été pris en otage par deux hommes armés.

C’est dans un hangar de Goiana. dans l’aérodrome Nacional de Aviação que Ploc Social retrouve en revanche au milieu d’ultra légers (ULM, dont un Montaer MC01 doré et blanc; notez son indicateur de vitesse Venturi sur la droite) et les habituels Cessnas, un VansRV-10 à belle allure, rouge et gris très clair, c’est le PR-JAZ (PIA-10-010) bien reconnaissable ; il avait été repéré sur l’aérodrome de Flores, à Manaus. Il appartient à Agropecuaria Schio LTDA.

Un autre Vans RV-10 est garé aussi dans un hangar: c’est le PP-XTN qui lui aussi pose problème, car il n’a plus du tout la même apparence que celui aperçu avec la même immatriculation à Ituiutaba et mis en ligne les 19 et 20 décembre 2019.

Cette seconde apparence recouvrant en fait adroitement celle observée lors de la rafle !  Il semble avoir été repeint pour être mis en vente en fait, annoncé à 550 000 reais. La photo de la Police l’annonçait le 5 avril précédent résidant (et saisi ?) à Bahia. Son propriétaire étant Alam Conceicao Peres de JetFly Aviacio LTDA.  Celui-là n’est pas un inconnu :  avec le pilote Denilson Carlos de Lima, il a volé en 2006 le bimoteur Beech Baron B58, immatriculé PR-BAC, appartenant à Edson Wander Silva, à Itaituba / PA, transportant dans l’avion Heverton Da Silva Oliveira et Bruno Eduardo Martins, deux membres d’un gang. Et en tant que copilote, il est allé chercher de la dogue en Bolivie et l’a transportée à Fazenda Buburé, sur le même bimoteur PR-BAC. Il avait reçu 10 000 dollars pour ce travail. Le Beechcraft a depuis été versé (une fois repeint) au Graesp ( Grupamento Aéreo de Segurança Pública do Estado do Pará), portant l’insigne Guardião 11. « Guardiões da Amazônia »

Des avions en kit, une nouveauté

Toujours dans la même catégorie, preuve du succès de ce type d’appareil au Brésil, ont trouve le PP-XTU, aperçu dès 2012 sur l’aéroport de Brasília Juscelino Kubitschek. Encore un Vans, décidément bien en vogue. Mais il habite ailleurs (pas très loin en fait) :  cette fois nous sommes arrivés à Unai, dans le Mato Grosso, (Paracatu) avec une rafle survenue en décembre 2109 en réalité. Il appartient à Danilo Julio Gatto. A première vue dans un hangar pas trop bien entretenu (le N°4, il y en a 6 au total, le plus grand n’a été bâti qu’en 2013) du petit aérodrome visité ici en 2011 pour montrer le bel American Champion Decathlon PR-CNA. Il abritait aussi le Beech PT-OLK, de Dionisio Bertolini, et c’est un classique EMB-720 Minuano que les policiers découvrent au premier alors qu’on y travaillait encore sur son moteur (son capot est au premier plan sur la photo) :

A peine arrivés, il arrêtent en flagrant délit un supposé mécanicien en train d’effectuer l’entretien clandestin de l’appareil. Dans le hangar, où l’on distingue au fond une carrosserie de Wolskwagen coccinelle, fort prisée au Mexique où elle a été produit en masse, on trouve également un autre drôle d’engin, un avion ULM immatriculé PU-SAR (de typeWega 180), immatriculation qui ne dit rien à personne en fait. Le Wega 180, un avion rapide (350km/h !) entièrement en carbone lui aussi étant une production locale signée Wega Industria Aeronautica installé à Palhoça, à Santa Catarina !!! L’ANAC en tout cas ne sait pas qui il est exactement !!! Dans un autre hangar les ultra-légers motorisés sont nombreux : PU-AMJ, le PU-PAA, le PU-RGN (un Inpaer Conquest), le PU-IAL, plus le PT-IYP mais bien plus classique (c’est un Piper PA-28-140 Cherokee appartenant à l’Escola De Aviaco Civil ACB LTDA – ME). Parmi eux pas mal de modèles Paradise, fort en vogue aussi.

Cette vogue des avions légers en Kits n’a pas échappé non plus aux trafiquants car ces ultra-légers sont aussi facilement démontables et peuvent d’autant plus se dissimuler dans un camion. C’est ainsi que l’on a retrouvé l’un de leurs, modèles à la Guajira (en Colombie) en janvier 2018 (on fait de même des mini-Tucanos aruourd’hui). Un modèle Pulsar, vendu en kit, reconnaissable à ses formes mais aussi ici à l’emplacement caractéristique de ses entrées d’air type NACA sur le capot moteur (ici à droite)

Dans un autre registre d’appareils, en octobre de la même année on retrouvait un modèle Lancair IV, premier du genre (cf ci-dessous; il est entièrement en composites), toujours à la Guajira, abandonné en plein champ de canne à sucre. Venu bien sûr pour un chargement… bien la preuve que les narcotrafiquants s’adaptent constamment… et leurs pilotes également !

Derrière eux à Unaï toujours, c’est le Cessna 210 muni d’un radar d’aile annoncé à la vente ici pour 1 300 000 reais (200 000 euros ce qui semble un peu élevé pour un avion manifestement retapé, sans référence aucune de date de construction). Sa décoration extérieure ne correspond aussi à aucun exemple connu. C’est fou ce qu’il y a comme artistes du pistolet à peinture, à Goiânia !!!

Le pompon revient sans doute à l’aérodrome «Ninho das Águias», à Vitória da Conquista, un endroit magnifique. Selon la police, l’aérodrome fonctionne, certes, mais sans aucun permis environnemental, sur des terrains appartenant à l’Etat, en plein dans un biome fragile de la forêt atlantique !!! L’emplacement est sur la BA-263, dans la ville de Goiabeira (au Minas Gerais, dans la Microrégion d’Aimorés), près de l’aéroport Pedro Otacílio Figueiredo, à Vitória da Conquista.  On y a pris en photo leBeechcraft 58 Baron  TH-1202 immatriculé PT-ODU, de Dalmar Ferraz De Melo Junior. Celui-là a été embarqué dans une procédure qui a vu la fermeture décidée par la justice de son aérodrome de Vitória da Conquista « arrêtant toute activité d’atterrissage et de décollage d’aéronefs, avec l’embargo total de l’aérodrome », plus la saisie d’un aéronef Neiva « Corisco » (modèle BEM-711ST, numéro de série: 711464), le PT-VHG,  et d’un Cessna (modèle: 182R, numéro de série: 18268362) le PT-OIL en fait.  D’autres Beech Baron apparaissent au fil des saisies (ça se fait par Etats, et elles n’ont pas lieu toutes à la même date, alors il faut les décortiquer !).  Dans l’excellent reportage de Globo apparait tout à coup un Beechcraft Baron, immatriculé PR-HHA (N° TH-1336), vu ici récemment dans l’État de Santa Catarina à Navigantes en juin 2019. Lui aussi a subi un lifting réussi : il a nettement rajeuni depuis 3 ans !!! Décrit comme appartenant à Cavok Avionicos Servicos Administrativos Eireli.

Un autre gris et blanc a été lui aussi présenté comme faisant partie d’un réseau. Il ressemble beaucoup au TH-766 PR-SOB aperçu en juin 2019 à Curitiba.  Or c’est celui du gouvernement du Parana !!! On indique qu’il a effectivement changé de propriétaire vers mars 2018, appartenant auparavant à Distribuidora Perola Negra Ltda de Sorocaba, un distributeur de boissons (jus de fruits). La société se serait fait saisir son avion ? Les Beech Baron ayant la côte au Brésil, on l’a vu, on en découvre un autre encore dans un autre hangar.  Il est facilement reconnaissable:  c’est le Beechcraft 95-B55 Baron TC-2437, immatriculé  PR-MJB opéré par Alam Conceicao Peres (encore lui) et appartenant à Antonio Barbosa Maia, photographié ici à Jundiai en juillet 2018 et là à Campo do Marte le 3 avril 2014. C’est à Jundaï aussi qu’avait été repéré le PT-CQA, un Beechcraft monomoteur Bonanza (EA-195) appartenant au réseau Rocha vu précédemment. Le groupe de Mauro Cláudio Monteiro Loureiro, plus connu sous le nom de Murruga, et son hangar plein d’avions à l’aéroport de Bragança Paulista, (voir ci l’épisode CCCVIII avec notamment le portugais Mauro Loureiro). Un bloggeur avait remarqué une incongruité sur cet avion : bien que muni d’une immatriculation brésilienne, il portait toujours sur son empennage un petit drapeau américain !

Les Beechraft Baron-58, sur-représentés comme on le sait au Brésil, sont bien présents dans la rafle. Le site Dialogo, qui évoque la chose militaire au Brésil révèle un cliché de hangar sur lequel un appareil de ce type figue au premier plan, raflé lors de l’opération Cavok citée. L’appareil est « nickel », il a été fraîchement repeint, ce que l’on constate à le comparer à un autre cliché pris auparavant dans un autre hangar (cf ci-dessus). Celui de Porto Nacional dans le Tocantins (situé plus au milieu du pays) et son école d’aviation. L’avion (N°TH-1803) immatriculé PR-RGN appartient à Uderson Viera.

Ironie du sort, l’aérodrome du Tocantins avait reçu en 2019 en cadeau de l’Etat un Cessna 210L Centurion II saisi en 2015, l’exemplaire PR-RRM) des trafiquants et retapé avec des réservoirs plus grands pour desservir des villages plus éloignés, dont Araguaína, Gurupi, Porto Nacional et Paraíso (ici à gauche). « En raison de son état de conservation et de ses performances, il a été revendiqué par plusieurs États et la proposition du gouvernement de Tocantins pour une utilisation dans la sécurité publique a été acceptée. Le modèle est idéal pour les groupes de police, étant un avion polyvalent avec un faible coût de maintenance » avait-il été précisé. C’est celui (ex N243BC) qui avait déjà été repeint par Ricardo Santos Cosme Silva et découvert lui à l’aéroport Marechal Rondon à Varzea Grande.

On ajoute bien sûr à cette liste un gros engin déjà étudié dans l’épisode précédent, à savoir le Cessna 208B immatriculé PT-MEK apparu au Brésil pour la première fois à Goiânia (GO) et saisi à Pernambouc, rempli à ras bords de cocaïne : 648 kilos ! il y en avait jusque sous la carlingue dans le long compartiment à bagages caractéristique de la version .  « Selon le délégué de la police Eduardo Passos, le schéma a été découvert après avoir analysé les changements dans l’itinéraire de l’avion. «Le pilote est déjà une vieille connaissance de la police fédérale pour avoir été arrêté auparavant pour trafic international de drogue», dit Passos. « Nous avons commencé à surveiller l’avion par radar et vérifié qu’il avait un plan de vol qui passait par Araripina et atterrissait à Recife. Quand il a commencé à ne pas suivre cette route – il ne s’est pas arrêté à l’aéroport d’Araripina, il s’est arrêté à un aéroport illégal, et quand il est arrivé à Recife, toujours sur la piste, il a accusé en disant qu’il se rendrait à l’aérodrome de Coroa do Avião – nous avons réalisé qu’un mouvement inhabituel était en cours et très similaire au trafic de drogue.  » L’avion déclaré à Novatur Tursimo LTDA était opéré par CTA-CLEITON Taxi Aereo LTDA (lire ici).

Scène de guerre à l’aéroport

Les délinquants brésiliens ne sont pas des enfants de chœur, on s’en doute. Quand ils ne trafiquent pas de la drogue, ils attaquent des banques, on l’a vu ici de même au Paraguay, ou leurs transporteurs de fonds. Le Cessna 208 B existe aussi en version cargo.  Il est utilisé tel quel à Pernambouc justement, par une société de transferts de fonds par voie aérienne, un métier risqué quand on connait le pays. C’est le cas, notamment du PR-IHP « Super Cargomaster » de Two Taxi Aero LTDA, qui vole beaucoup comme on peut le constater ici. En septembre 2018, une tentative d’attaquer la cargaison de cet appareil mandaté par une banque a eu lieu à l’aéroport de Salgueiro, dans l’état de Pernambouc au Brésil. Les assaillants, armés de fusils et d’une mitrailleuse lourde dissimulée dans un énorme SUV Nissan, avaient investi la piste dans l’espoir de subtiliser le numéraire destiné à alimenter les guichets électroniques, selon un communiqué de la Police Fédérale. Hélas pour eux, il étaient attendus de pied ferme par les gardes de sécurité des voitures de transport de fonds et ceux de l’aéroport, qui se sont livrés à un échange de tirs nourris avec les malfaiteurs avant qu’ils ne puissent prendre le contrôle du butin espéré. Cinq assaillants avaient été abattus sur le tarmac durant la fusillade, et cinq autres arrêtés, dont un blessé, transféré à l’hôpital.  Lors de l’opération six fusils de guerre et une mitrailleuse avaient été saisis (ici droite à gauche).

Les plus grosses bêtes

De plus gros engins ont été cette fois saisis, qui ressemblent plus à des avions VIPs qu’à des engins de transport, quoi que trois d’entre eux au moins ont des capacités longue distance, pouvant atteindre l’Europe. Commençons par une belle bête, un Beechcraft C90 King Air, extérieurement parfait. A l’intérieur c’est moins… neuf, avec même des petits rideaux plissés façon grand-mère : les truands aiment les côtés « cosy ». On découvre après quelques recherches d’où il provient, bien aidés par sa décoration particulière et des détails minimaux comme les petites étiquettes indicatives laissées au-dessus du filet noir, au-dessus de l’immatriculation dissimulée par la police : c’est bien le PR-GCS, un Beechcraft C90 King Air de 1981 d’Airmedplan Servicios LTDA depuis 2014, l’ex N31TL de Tadewinds Aircraft Sales Inc. Lakeland en Floride, exporté le 11 août 2011 au Brésil. La société est basée à Belem. La page Facebook le présente en compagnie d’un autre appareil, de deux ambulances et d’un équipe restreinte de six personnes.

Le second appareil sur la gauche ici figure ailleurs dans le même site, qui le montre cette fois de profil, dévoilant son immatriculation en PT-WJZ, qui est clairement un Cessna 550 Citation II. Un PT-WJZ qui avait reçu ses nouvelles couleurs en 2012. Sur les clichés fournis par la police, un appareil semblable est montré, son immatriculation masquée comme il se doit là bas (en raison des avocats toujours à l’affût).

Or une vidéo écourtée de la police nous montre un bout d’immatriculation du Cessna attrapé dans la basse : c’est PT-WJ… quelque chose. Pas la peine en fait de chercher plus loin : le PT-WJZ est toujours là, mais plus comme ambulance : il est devenu « Intensive Taxi »,  pris en photo ici avec exactement la même nouvelle déco extérieure que le Citation saisi (qui paraît plus ancienne en fait !).  C’était le Citation II de 1981 de Safra Leasing SA Arrend Mercantil depuis 1995, ex N642BB et ex PT-LJT !!!  C’est bien le même !!! 

Un autre beau jet saisi, plus petit, a aussi été dévoilé par la police. Apparemment c’est un Cessna 525 CitationJet CJ1, reconnaissable à la fixation de son aile qui est en fait un plus haut sur pattes que ses prédécesseurs modèle Citation. Celui-là, c’est en fait le PT-STK de Star Odonto-Medical Ltd Brazil, de Manaus, dont on ignore si l’entreprise est réelle ou pas (un chirurgien dentiste inexistant ?), c’est l’ex N881KS  avion de l’Etat du Kansas au logo impressionnant sur l’empennage.  L‘avion avait été exhibé avec des montres de valeur et l’argent trouvé chez les narcos.  Dans le même hangar avaient été réunies également les grosses cylindrées chères aux narcos, désespérément tous restés frimeurs. Selon le répertoire officiel d’Etat « son statut d’enregistrement est « Active » et sa principale activité économique est Activités de conseil en gestion d’entreprise, à l’exception de Consultoria Tecnica Especifica ». Mais l’appareil présente une autre histoire également. Il appartient réellement à Ulisses Leite, qui possède Brasil Negócios, son vrai propriétaire.  Leite avait été dénoncé en 1999 pour avoir négocié la libération des précaires de la Direction nationale des routes (DNER). C’est son fils José Rodrigues Mundim Neto qui en faisait grand usage, lui, devenu acteur de télé-réalité, posant de façon médiatique sur l’aile de l’appareil (ici à droite). « selon un rapport de l’Agence nationale de l’aviation civile, le préfixe d’avion PT-STK, propriété de Brasil Negócios Participações Ltda, par José Rodrigues Mundim Neto, a un certificat de navigabilité irrégulière. Le rapport a tenté de contacter Mundim Neto pour connaître sa relation avec l’opération de police qui a saisi l’avion qu’il utilisait. Dans sa société de production de Rio Preto, personne n’a été trouvé ou n’a répondu aux appels téléphoniques ».  Et comme tout frimeur, il s’était aussi doté de voitures de sport voyantes : « l’homme d’affaires Gleyb Ferreira da Cruz, ancien conseiller de Carlinhos Cachoeira, dans une déclaration publique enregistrée au 1er Anápolis Notes Office (GO), affirme avoir acheté Ferrari, en janvier 2017, à José Rodrigues Mundim Neto, le DJ. Selon Gleyb, le montant payé était de 1,2 million de reais. » L’une des voitures saisies, montrées par la police dans le même hangar que l’appareil (à gauche l’équipe de policiers posant fièrement devant leur capture  !

 

L’autre belle bête annoncée comme saisie est un gros Beechcraft 200 datant de 1997; immatriculé PT-MJD (N°BB-1589) de Kviv Participacoes Ltda, société installée à Sao Paulo depuis alors 7 années. Ci-dessous sa photo, prise le 3 janvier 2020 à Sao Paulo Campo de Marte où l’engin était visiblement basé. Il a été enregistré fort récemment chez « Kviv », en juin 2019, ce qui augure d’un recrutement pour une expédition particulière (comme celle de notre fameux Beech PR-IMG. de Guyana, lui aussi en leasing de la banque Bradesco ?). Auparavant il faisait office d’avion VIP pour l’agriculture, d’abord chez John Deere de 1998 à 2011 puis chez Capuan Agricola SA (en leasing chez Bradesco).

Reste celui mis au secret depuis quelques mois (il avait été serré en août 2019, lors de l’Opération baptisée Icare) et révélé comme ayant été saisi l’été dernier : les plus gros de tous, un Falcon 50, engin plus rare en ces contrées et pas très utilisé par les narco-trafiquants à vrai dire. C’est le PR-FJL Falcon 50, ex Interjet Aviation Llc de Fort Lauderdale, Floride, exporté au Brésil le 6 août 2013 et exN87FJ et C-GOIH de Skyservice Business Aviation. Celui-là, les policiers avaient remonté sa trace via un de ses pilotes, Bruce Lee Carvalho dos Santos, aux commandes habituellement du Piper (Neiva) EMB-810D Seneca III immatriculé PT-VPH, appartenant à l’organisation, et disparu corps et bien en décembre 2018.

Selon certaines sources, cet avion serait tombé dans un lac en Bolivie après avoir heurté un fil à haute tension, bien que l’avion et le corps n’aient jamais été retrouvés.

Les pilotes du Falcon n’avaient pas été très malins en envoyant des selfies de leurs séjours à Dubaï payés par leurs trajets risqués emportant de la cocaïne.
Bruce Lee (quel prénom !), on peut le noter, était le frère de Mohammed d’Ali, qui avait été reconnu coupable du meurtre et du démembrement de l’Anglaise Cara Marie Burke, en 2008, à Goiânia. Il est mort lui au pénitencier de Coronel Odenir Guimarães.

Ces voyages en petits bimoteurs ou monomoteurs étaient risqués, note l’article, car « les criminels utilisaient des avions modifiés pour augmenter l’autonomie, ou faire le plein pendant le vol avec des litres  de carburant et volaient extrêmement bas pour échapper au contrôle aérien, en plus d’utiliser des équipements de localisation, tels que des transpondeurs, désactivés. Ainsi, la drogue a été acheminée, via l’État du Pará jusqu’à Goiás, sur la fameuse «route caipira» du trafic de drogue. Au Brésil, les stupéfiants étaient stockés et préparés pour être exportés vers les pays européens, dont la France, les Pays-Bas, l’Allemagne et la Belgique. Différents dispositifs ont été utilisés pour expédier la drogue cachée parmi les produits destinés à l’exportation, comme le granit et le marbre (les deux photos ici), ainsi que dans des chargements de denrées alimentaires», explique la police civile ».

Voici un exemple typique d’envoi, dissimulé sous des carreaux de marbre disposés en palettes. Là, en France, à Caen, c’est  au milieu d’un chargement de bois. Le 18 novembre 2019, dans le port de Santos, dans l’État de Sao Paulo, c’est dissimulé dans le bras d’une tractopelle d’occasion que l’on a trouvé 158 kilogrammes de cocaïne qui y avait été cachée.

Le cargo qui l’emportait était en partance pour Anvers (ici à droite) !

L’hélico de Felipe Ramos Moraes !

Et comme nous sommes au Brésil, est pris aussi dans le filet l’indispensable hélicoptère, immatriculé PP-BAS. Un superbe Eurocopter EC 130B4 (N°4642), un « Colibri », lui aussi basé à Sao Paulo Campo de Marte et indiqué officiellement comme appartenant à AFS – Aoio Aministrativo Eireili, mais dont le propriétaire s’appelle José Carlos Gonçalves, alias Alemão (« l’Allemand »), qui l’ acheté en 2005 et a joué ensuite avec au passe-passe pour brouiller les pistes.

« En 2017, l’hélicoptère aurait été vendu à trois personnes, dont l’un est Alemão. lui-même et environ un mois plus tard, selon les enquêtes, il a fait partie d’une fausse société appelée JM Administração de Bens Móveis e Imóveis. Les enquêtes ont indiqué que la société propriétaire de l’hélicoptère avait un capital social de 1 million de reais, mais que la société n’existait pas et que l’emplacement présenté comme siège social était une pièce abandonnée. Le PF a également constaté que l’autre adresse répertoriée comme appartenant à la société propriétaire de l’hélicoptère, à l’ouest de São Paulo, n’avait même pas la numérotation indiquée. S’il avait songé à ça avec cet engin, c’est qu’il en possédait aussi un autre cet « Alemao » : et effectivement puisqu’il s’agissait du fameux PR-YHB (ici à droite) qui avait tant défrayé la chronique avec aux commandes l’incroyable Felipe Ramos Moraes, lors du non moins incroyable guet-apens qui avait coûté la vie à deux chefs de gangs dangereux Rogério Jeremias de Simone, alias Gegê do Mangue et Fabiano Alves de Souza, de Paca, rappelez-vous. Pour la police fédérale, cette procédure de jongler avec les hélicos «avait pour objectif principal d’entraver la performance des services de police dans l’enquête sur le double homicide ». Il étaient tombés, on l’a vu, dans un piège (l’hélico à peine posé avait été criblé de balles) aujourd’hui décrit ainsi : « D’après ce qui a été exposé jusqu’à présent, c’est un fait qu’il y avait une stratégie des membres du PCC en charge de l’exécution de Paca et Gegê do Mangue, dont l’ordre est venu de Marcola, qui a pris une certaine période de planification », indique le document de la police fédérale. « Marcola » étant Marcos Willians Herbas Camacho, le chef du Primeiro Comando da Capital (PCC) qui purge en ce moment 234 années de prison (il a été arrêté en 1999 !). Celui qui ordonne de tuer de sa prison, quand il n’y fomente pas de terribles émeutes  : « en mai 2006, Marcola a obtenu des enregistrements d’une audience, qui prévoyait de le déplacer avec 700 prisonniers dans une prison à sécurité maximale. Immédiatement, Marcola a contacté les dirigeants du PCC par téléphone portable et a organisé des attaques stratégiques contre la police brésilienne, ce qui a conduit le PCC à orchestrer l’épidémie de violence de São Paulo, entraînant la mort de plus de 150 personnes. La violence a conduit au transfert de Marcola au pénitencier Mauricio Henrique Guimaraes Pereira, une prison à sécurité maximale de Presidente Venceslau, où il est actuellement en poste (…) Le 8 juin 2006, Marcola a témoigné devant le tribunal qu’il était le chef officiel du PCC et a décrit le PCC comme étant organisé «comme une toile constituée d’une hiérarchie organisée compréhensible». Il continue d’avoir des contacts avec les dirigeants du PCC par le biais d’appels téléphoniques depuis l’intérieur de la prison et a déclaré dans une interview: «C’est vous qui avez peur de mourir, pas moi. En fait, ici en prison, vous ne pouvez pas entrer et me tuer, mais je peux ordonner de vous tuer là-bas « . « En 2016, Alejandro Camacho Jr., le frère de Marcola, a été arrêté à Fortaleza lors d’une descente de police, avec 36 arrestations, où une demi-tonne de cocaïne et 26 tonnes de marijuana ont été saisies. »

Le caïd au bout de la chaîne : juste libéré, il a recommencé

C’est RTBF info qui résume le tout le 30 septembre 2019 : »les saisies de cocaïne au Brésil ont été effectuées le 2 avril dans le port de Santos et le 10 juin dans le port de Itajai, avec respectivement 557 kilos et 506 kilos de cocaïne dissimulés dans des chargements de marbre/granit à destination d’une société belge. La police brésilienne a alors lancé des enquêtes impliquant des suspects et sociétés brésiliennes et a de son côté interpellé de nombreux suspects. Parmi ceux-ci figure D.M. Leonardo (en fait Leonardo Dias Mendonça, ici à son entrée et à sa sortie de prison), considéré comme le numéro 2 du trafic international de cocaïne au Brésil. L’individu avait précédemment été condamné pour l’organisation d’importations par avions de cocaïne entre les pays producteurs et le Brésil, activité qu’il aurait reprise depuis sa libération. La cocaïne était acheminée depuis la Bolivie vers le Brésil par centaines de kilos et par avions légers se posant sur des terrains de campagne improvisés. La drogue était ensuite transportée par voie terrestre vers des ports en vue de son envoi vers la Belgique. Elle était dissimulée dans des marchandises licites avant sa mise en containers. Les activités étaient principalement menées dans l’état de Goias et dans des ports côtiers comme ceux de Santos et Itajai ». Bref, nous revoici avec un cas pendable, plusieurs fois décrit ici comme ayant continué à diriger son gang depuis sa cellule, via ses téléphones portables, un fléau jamais endigué là-bas (il en avait déjà été accusé !) et qui, à peine libéré, a repris la direction de son trafic antérieur habituel. Il avait été condamné à 39 ans de prison et sa sortie était une semi-liberté, les prisons étant bondés !!! On tourne en rond au Brésil, pour endiguer le trafic de cocaïne !

 

Le journal citoyen est une tribune. Les opinions qu’on y retrouve sont propres à leurs auteurs.

 

 


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