Au Brésil il y a les trafiquants… et les politiques. Certains font les deux, comme au Venezuela. Cette fois, on va s’intéresser à un bien étrange cadeau de Lula aux gros industriels, dissimulé sous l’aspect de la relance industrielle du pays : des prêts à taux très bas pour acheter des jets privés, plutôt brésiliens, ceux d’Embraer bien sûr. C’est fou ce qu’ils ont eu comme succès. Et c’est fou aussi comment Lula a voyagé des années en avion privé…
La clinique du Diable
D’autres moyens détournés ne sont pas loin des techniques chères aux trafiquants de drogue. La médecine non plus n’échappe pas à la voracité des voyous et des magouilleurs brésiliens : « l’opération de police civile qui enquête sur des écarts présumés de 50 millions de reais en fraude lors d’audits médicaux entre l’Institut d’assistance aux fonctionnaires de l’État de Goiás (Ipasgo) et l’Institut d’oncologie et d’hématologie de Goiano (Ingoh) a saisi un avion, des voitures de luxe, œuvres d’art et documents à 19 adresses à Goiânia, liées principalement à Ingoh. Au siège de l’institut, les agents ont collecté les médicaments et les dossiers médicaux des patients vus dans les cliniques de la chaîne. Les équipes de police ont également procédé à des mandats de perquisition et de saisie dans les maisons et appartements des dirigeants d’Ingoh et d’anciens dirigeants d’Ipasgo ». Des tripatouillages informatiques laissaient les comptes clients abonder la clinquante même après l’arrêt des soins, des factures jusqu’à dix fois le montant des autres cliniques, tout était bon pour faire de l’argent. Y compris fourguer des traitements très onéreux inadéquats contre le cancer ! Les policiers étaient remontés jusqu’aux responsables grâce à leurs grosses voitures trop voyantes, comme les mafieux… et un avion : un Beechcraft Baron de 1999 immatriculé PT-OEV, saisi bien sûr lui aussi ! L’avion étant justement au nom de l‘hématologue Edmo Dias Pinheiro.
Une banque de développement bien arrangeante
On le sait, l’équipe de Lula ou de Roussef adorait sillonner le pays en jet. Ça je vous l’ai expliqué ici. Nombre de fois on l’a vu descendre d’un Cessna type Cessna 525, par exemple, tel le PR-BIR appartenant à Samos Participacoes LTDA. Un holding appartenant à Holding du ministre des Relations institutionnelles, Walfrido dos Mares Guia, soupçonné d’être l’un des créateurs et exploitants de l’allocation mensuelle du Minas Gerais :
« selon le magazine IstoÉ, en 2002, année de la création de Samos, Mares Guia a déclaré un revenu de 1,1 million de reais – mais le Trésor a découvert un mouvement de 22 millions de reais par Samos cette année-là. La police fédérale a identifié deux manuscrits de Mares Guia se référant à des transferts qui auraient été faits aux alliés de la campagne azeredo » du nom du sénateur du Partido da Social Democracia Brasileira (PSDB) du Minas Oeiras, Eduardo Brandão de Azeredo. Il a été accusé de détournement de fonds et blanchiment d’argent dans l’enquête Criminal Action 536, condamné en première instance en décembre 2015 et en deuxième instance en août 2017, puis définitivement à un peine de 20 ans et un mois le 23 mai 2018. P
armi les avions repérés, celui du député Eduardo Campos présenté comme une oie blanche avant que son Cessna Cessna PR-AFA ne s’écrase le 13 août 2009 à Santos dans des circonstances restées fort troubles (voir ici le détail). L’avion de 1-7 million de reais appartenait à João Carlos Lyra Pessoa de Melo Filho, via la société Lidemac, bénéficiaire de contrats millionnaires avec le gouvernement PSB de Pernambouc. Elle avait reçu 75 millions de reais pendant la période de gouvernement d’Eduardo Campos et a continué jusque 2016 à en obtenir d’autres aussi juteux.
« Lidermac Construções est également cité dans l’opération Turbulence pour des crimes de blanchiment d’argent avec des entreprises fantômes – plus de 600 millions de reais -, un don illégal à des campagnes électorales et un financement par la case deux des politiciens du bloc qui domine la politique de Pernambouc et est ostensiblement représenté dans le gouvernement de Michel Temer avec pas moins de 4 ministres: Mendonça Filho, de DEM; Bruno Araújo, du PSDB; Raul Jungmann de PPS et Fernando Bezerra Filho (le fils , du PSB. L’un des partenaires de Lidemac est l’homme d’affaires Rodrigo Leicht Carneiro Leão, gendre du ministre de la Cour des comptes de l’Union José Múcio, homme politique du PTB. » C’était bien elle qui avait permis l’achat de l’appareil : « la société de construction (Lidermac Construções) a transféré, selon l’enquête, 159,9 milliers de reais à la société Câmara e Vasconcelos, qui a acquis l’avion deux jours plus tard pour 1,7 million de reais. »
Les jets à crédit (pas chers)
Cette pratique a été encouragée par la Banque brésilienne de développement, (en portugais Banco Nacional de Desenvolvimento Economico e Social, BNDES ) qui a prêté à très bas taux à des entrepreneurs pour acquérir des jets qui servaient ensuite aux politiciens. Au total, la BNDES a prêté 1,9 milliard de reais à des politiciens, des hommes d’affaires et des célébrités pour acheter des jets ont constaté les enquêteurs !!! Essentiellement pour acheter des jets de chez Embraer ! Un moyen indirect de soutenir l’aviation nationale ?
La liste des versements pour achat d’avions, révélé par le gouvernement Bolsonario qui en a fait ses gorges chaudes, bien sûr, est celle-ci:
- CB Air Taxi Aéreo – R$ 77,78 milhões (2013)
- Brasil Warrant Adm de Bens – R$ 75,46 milhões (2013)
- Sumatera Participações – R$ 65,96 milhões (2013)
- Construtora Estrutural – R$ 64,01 milhões (2012)
- Industrial e Comercial Brasileira – R$ 59,11 milhões (2013)
- Lojas Riachuelo – R$ 55,52 milhões (2013)
- Neo Táxi Aéreo – R$ 44,97 milhões (2011)
- Doria Administração de Bens Ltda – R$ 44,03 milhões (2010)
- Eurofarma Laboratórios – R$ 43,99 milhões (2014)
- JBS S/A – R$ 39,78 milhões (2009)
En tête du classement arrivent les frères Joesley et Wesley Batista, propriétaires de l’abattoir JBS devenus, une fois coincés, lanceurs d’alerte en admettant avoir versé des pots-de-vin à des centaines de politiciens.
En novembre 2009, ils avaient par exemple emprunté 39,8 millions de reais à la BNDES pour acheter un avion, grâce à un prêt d’une durée de 10 ans et d’un intérêt de 4,5% par an. José Batista Junior, le premier-né, a pris 5,9 millions de reais dans les mêmes conditions, mais pour le compte d’une autre société. L’avion était le gros Gulfstream GV-SP 550 de la banque Wells Fargo, datant de 2011, valant 65 millions de dollars, immatriculé N989AR (ici à droite).
Idem pour le présentateur de TV Globo, Luciano Huck, fort critique de Bolsonaro, qui avait pu le renvoyer facilement dans les cordes en révélant qu’il s’était offert avec un taux fort préférentiel de la BNDES -entre 3 et 3, 5 % de taux d’intérêt- son beau Phenom 300 PP-HUC, mis en service chez Icon Aero Taxi.
« L’un des aéronefs saisi par la police fédérale lors de l’opération Fazendas de Lama (deuxième phase de Lama Asfáltica) a été contesté par des hommes politiques du Mato Grosso, dont André Puccinelli ( PMDB), Edson Giroto (PR) et l’adjoint au maire retiré, Gilmar Olarte (PROS) » . L’objet de leur critique, c’est « un petit jet Embraer, année 2011, immatriculé PP-JJB…
Ou «Cheia de Charme», nom par lequel il s’est surtout fait connaître dans le milieu » (c’est celui d’un soap-opera de TV globo de l’année 2012 où l’on voyait des jets de chanteurs, surchargés en décoration) C’est un Phantom 100 d’Embraer (le PP-JJBn ex N222GP, comme on peut le voir ici, et des policiers montant dedans en 2014 avec comme passager Edson Giroto. « En concertation avec le système aéronautique de l’Agence de l’aviation civile (Anac), le Phenon 100, qui a déjà transporté plusieurs hommes politiques du Mato Grosso do Sul, voit son certificat de navigabilité suspendu et «indisponible», pour cause d’aliénation fiduciaire.
Le véritable propriétaire de l’avion est Banco do Brasil, une institution qui a contribué à l’opération également publique financée par la BNDES . » « La justice a également déterminé l’indisponibilité » (une saisie, quoi !) d’un autre avion leur appartenant : le modèle Piper Aircraft PA-31T1 Cheyenne I, immatriculé PP-CMV (ici à droite).
João Doria, ancien responsable de l’institut du tourisme brésilien, maire de São Paulo en 2016, devenu depuis ouverneur de l’État de São Paulo, voyageait pour sûr « pour son travail avec son avion privé à 30 millions de dollars », selon le Jornal do Tocantins Le jet, toujours d’Embraer, financé par Bradesco, et payé aussi comme les autres par des prêts minimaux de de la BNDES. Il affichait modestement l’immatriculation PR-JDJ – celle des initiales de João Doria Junior ! Ce grand ERJ-135BJ Legacy 600 de 2010 appartenait en fait usa société à Doria Administracao De Bens LTDA, il vient d’être revendu le 6 janvier 2020 à la société Eucalipto S.A.
Cette société Doria Administracao De Bens, l’un des partenaires d’Alpargatas, est aussi active dans le secteur agricole et appartient à la famille Moreira Salles, partenaire d’Itaú Unibanco. Doria s’était vanté avant les révélations « de voyager avec «mon argent qui est le mien, dans mon avion» et qu’il n’utilisait pas d’argent public «pour ce faire». » Il possède aussi le PP-JDJ, un hélicoptère aussi à ses initiales, un Bell 429 Global Ranger plutôt récent,ex N447BB C-GFPY, et C-GLZK.
Selon Alerta Parana, le secteur immobilier aussi a été arrosé : »Le bâtiment situé au 951 Avenida Tancredo Neves, la principale route d’accès à Cascavel pour ceux qui viennent de Santa Catarina, Rio Grande do Sul et la région de Foz do Iguaçu, garde les secrets de l’une des entreprises les plus prospères de la ville. À cette adresse, le siège administratif de Jota Ele Construções Civis Ltda, la plus grande entreprise de construction de l’Ouest, la troisième en importance au Paraná et la treizième au Brésil, connue pour des projets réalisés dans différentes régions du pays et qui depuis des décennies sont fières des habitants de Cascais non seulement pour les emplois génère, mais aussi pour la qualité du travail qu’il effectue. L’entreprise a tellement progressé qu’il est devenu essentiel d’acquérir un meilleur avion pour guider ses dirigeants dans les voyages destinés à inspecter les projets en cours et à prospecter de nouvelles affaires. C’est là que la compagnie a acquis un avion PT-FLX (ex PT-FUV, un Embraer Phenom 100 de 2010, N°50000174) d’une capacité de quatre passagers en configuration normale, mais pouvant en accueillir jusqu’à six ou sept avec un seul membre d’équipage. Et les vols se sont déroulés sans incident jusqu’à hier, lorsque le site O Antagonista a publié en exclusivité la liste des entreprises brésiliennes répertoriées dans ce que le président Jair Bolsonaro définissait comme la boîte noire de la BNDES pour avoir bénéficié d’intérêts s subventionnés pour l’acquisition de l’avion de dernière génération. »
C’est parfois devenu un début de roman dans la presse ces révélations : « Le jet d’affaires Legacy 650 a continué à vitesse de croisière sur la route entre Rio de Janeiro et São Paulo.
C’était une journée ensoleillée début mars, avec des nuages épars lorsque l’avion est entré dans une zone turbulente. En pleine instabilité, l’homme d’affaires de Pernambouc Flávio Gurgel Rocha – propriétaire des magasins Riachuelo, ancien député fédéral, ancien candidat à la présidentielle en 1994 et nom préféré du Mouvement Brasil Livre pour occuper le Planalto – a consulté les heures sur sa Philippe Patek Nautilus. Il était 14h30, les turbulences duraient quelques secondes, mais elles semblaient durer une éternité »,
dit le texte signé par le reporter Luís Lima. Le jet Legacy 650 acheté par le propriétaire des magasins Riachuelo en mars 2013 est l’un des 143 avions financés par la BNDES sous les gouvernements Lula et Dilma, à des taux d’intérêt inférieurs à ceux du marché. Le jet de Flávio Rocha était le sixième plus cher. » L’avion, le PP-NLR, est aujourd’hui stocké à l’aéroport Congonhas International paraît-il.
Et puis il y a aussi Icon Aviation « taxi aéreo » avec son gros Gulfstream GIV-X (G450) blanc PR-LHW, (N°4235), celui de l’entrepreneur Michael Klein,
revendu déjà depuis à Iveair Corp qui l’a très vite cédé (4 mois plus tard) à Eden Marine Ventures Ltd, pour devenir N45DP. Son PDG, visible ici en train de monter à bord, en a profité lui aussi pour s’offrir à bas prix… un Embraer EMB-505 Phenom 300,
le PP-SCN, ex PT-TJH à sa sortie d’usine (ici à droite. A l’origine CB Air Taxi (cité dans la liste en premier), une entreprise de la famille Klein, avait acheté Global Aviation pour former Icon, et elle a depuis avalé le taxi aérien Morro Vermelho, racheté aux héritiers de Sebastião Camargo, fondateur de la société de construction Camargo Correa SA.
Pour Neo Taxi Aereo Ltda, installé à Goiânia, même schéma, mais avec cette fois déjà un gros Embraer ERJ- 145 PP-FJA, ex PT-TAU acquis dès 2011 avec un prêt à 47 millions, pour s’ajouter au petit frère des débuts, un modèle Cessna 525 CitationJet 1 PT-FJA (525-0337).
Le procédé avait en effet permis à Embraer de fourguer pas mal de modèles Phenom 100 à plein d’autres d’entreprises encore avec ces taux d’emprunts mirifiques. Ils portaient souvent le nom de l’entreprise en immatriculation :
chez NPP Afropecuaria, qui fait dans l’animal de boucherie, grâce à 4,5 millions de reais à payer en 120 versements à un taux de 4,5% ça avait été l’achat du PR-NPP, chez Lavoura e Pecuária Igarashi LTDA, qui produit six pommes de terre sur dix consommées à Bahia et fait partie des trois plus grands producteurs de tomates du Brésil, deux versements de la BNDES en 2010 et 2013,
pour un montant montant de 6,4 millions de reais et 19,8 millions de reais respectivement ont permis l’achat du PP-IBR. Chez JBS SA, autre éleveur du pays installé à Sao Paulo le PP-EMO, JBS avouera avoir versé en retour plus 150 millions de dollars – principalement sous forme de pots-de-vin – à des politiciens brésiliens.
Chez Grupo OVD… le POVD, chez SPE – HNZ Administração Prati-Donaduzzi, le PR-HNZ, avec en 2013 un montant de 8,4 millions de reais à payer en 120 versements avec une charge d’intérêt fixe de 3,5% seulement. La société est connue pour être également à la tête du parc technologique Biopark, mais c’est surtout l’un des plus grands fournisseurs de médicaments génériques au Brésil ! Leasing Rent a Car en fin et son PR-RHB…
son contrat avec la BNDES prévoyait un paiement en 120 versements à un taux fixe de 5,5% majoré du taux d’intérêt à long terme (TJLP), calculé trimestriellement ! Figure aussi l’avocat
« Pedro Henrique Xavier (alias « PHX », ici à droite) qui s’est fait connaître pour sa défense de l’ancien directeur de Galvão Engenharia Erton Medeiros, et du bureau de change Carlos Habib Chater, dans le cadre de l’opération Lava Jato. Il a également été administrateur de faillite de la Banque de développement de l’État du Paraná (Badep) et président du conseil d’administration de Sanepar. Son nom figure sur la liste publiée par la BNDES en raison d’un financement contracté en 2013 pour l’achat d’un avion d’un montant de 10 millions de reais. Le contrat de 95 mois a été signé avec un taux d’intérêt fixe de 3,5% par an »…
Idem encore pour l’ancien gouverneur du Mato Grosso, Jaime Campos (DEM), et son Raytheon Beechcraft Beechjet 400XP, immatriculé selon les registres officiels N512XP (et RK307 en production selon la même source), d’une valeur déclarée de 6 264 020 reals (pour 76 millions de reals de fortune personnelle). Lui on ne sait pas s’il a bénéficié de cette aide, à vrai dire. L’avion lui a été remis clés en mains par qui vous savez : c’est bien sûr notre Joao Malago, le broker de Floride bien connu, fournisseur d’avions aux narco-trafiquants (encore un autre « JLM Aviation Services ») !!!
Symbole flagrant de toutes ces magouilles, à sa sortie de prison à Curitiba, l’ex président Lula da Silva montait à bord d’un Embraer désormais bien connu pour se rendre à Sao Paulo : le PP-HUC, et oui, celui du présentateur de télévision Luciano Huck, inscrit au nom de Brisair Serviços Técnica Aeronáuticos, société détenue par lui et sa femme Angelica, fait remarquer Noticias R7. Ce dernier interrogé, déclarait qu’il n’y était pour rien : « A travers le réseau social, Luciano Huck a écrit: «L’avion fait partie de la flotte d’Icon Taxi Aéreo, je n’ai aucune influence pour qui il est affrété». Dans une vidéo, il a précisé que, lorsque l’avion n’est pas utilisé par lui, il est mis à disposition pour d’autres vols affrétés moyennant des frais. Le présentateur, dans une note, a également nié que l’avion avait été cédé.
«L’avion fait partie de la flotte aérienne d’Icon Taxi et a été embauché par la compagnie pour le vol car il était disponible à la date demandée. Le planning de location des avions est sous la responsabilité d’Icon Taxi Aéreo et les détails sur l’opération uniquement avec la compagnie », précise la note (…) Icon Taxi Aéreo a précisé, par l’intermédiaire du bureau de presse, que Luciano Huck détient 50% de l’avion et que le reste appartient à l’entreprise. Il a également déclaré que le vol aurait pu être effectué avec n’importe quel autre avion à réaction, mais que celui-ci était disponible à l’époque ». Ben tiens !
Un aérodrome spécial pour les hommes politiques ?
Autre retombée des saisies, la découverte d’un bien étrange ballet aérien à quelques kilomètres à peine de Brasilia. Oh, pas pour de la drogue, encore une fois (quoique…), mais on reste bel et bien dans la magouille politicarde. Une énième, au Brésil, vous allez me dire ! La révélation est une autre déflagration dans ce pays à scandales permanents qu’est devenu le Brésil : c’est un site critique qui a balancé récemment l’affaire : selon lui en effet, « Les images publiées par le site O Antagonista montrent respectivement le député Fernando Bezerra Filho (DEM-PE) et le sénateur Jaques Wagner (PT-BA), quelques instants avant l’embarquement et quelques instants après avoir débarqué en jets privés sur une piste clandestine à proximité de Brasilia. Selon une publication, l’ancien ministre et ancien adjoint Geddel Vieira Lima, celui du bunker de 51 millions de reais découvert par la police fédérale à Salvador, visitait fréquemment l’aérodrome illégal. Et la pratique n’est pas exclusive à ces parlementaires. L’aéroport illégal est devenu à la mode parmi les puissants de Brasilia.
L’histoire du «Pirate Track» semble très brésilienne » note le magazine, passablement blasé à l’apparence. Le « bunker » décrit on le connait bien ici : c’est dedans qu’on avait trouvé des valises remplies de billets (ici à droite) !! .
Geddel, ancien ministre du tourisme de Lula, avait revendu en 2012 son avion, acheté 210 000 reais en 2012, pour 700 000… Geddel dirigeait un vrai gang qui « était avant tout familial : sa famille possédait en effet pas moins de 12 fermes à l’intérieur de Bahia pour une valeur de 67 millions de reals. Les fermes servaient au blanchiment d’argent par le biais de la fausse location de machines agricoles et des opérations de «gado de papel», de fausses déclarations d’animaux !!! » De fausses vaches, ou des taureaux sans papiers en quelque sorte !!! avais-je écrit. L’avion cité était le Cessna 402C PT-LKB, (N°402C-0118) un avion qui avait même été un temps mauritanien !
« Les propriétaires et employés de certains de ces hangars ont déclaré au magazine Crusoé qu’ils avaient des clients fidèles Aécio Neves, du PSDB de Minas, l’ancien ministre Gilberto Kassab, du PSD à São Paulo, et également l’ancien ministre Edison Lobão, de la MDB. de Maranhão. Aécio et Kassab volent dans des jets d’amis.
La famille Lobão possède deux avions, un Twin Commander (le PP-LOB ici à droite, le N°11355 acheté le 16 octobre 2013 à Veracity Aviation Llc, de Seguin au Texas, l’ex N89CU) avec dix sièges et un Piper, avec six. Avant d’être arrêté, l’ex-ministre et ancien adjoint Geddel Vieira Lima, celui du bunker de 51 millions de reais découvert par la police fédérale à Salvador, était un visiteur fréquent de l’aérodrome illégal … »
Le fils de Lobao, Edinho, volait lui en 2018 à bord de l’hélicoptère Robinson, enregistré comme PR-WUZ, appartenant à Difusora Incorporação e Construção LTDA : or cette machine n’avait même plus de certificat de navigabilité (délivré par l’ANAC) !
La piste « découverte » n’a en fait rien de clandestine, elle est répertoriée par l’ANAC au 22°11.68′ S et 47°51.72′ W, et c’est d’ailleurs le sénateur Angelo Coronel (PSD-BA), un de ses fervents utilisateurs, qui en a donné l’emplacement à la presse, croyant ainsi éteindre l’incendie médiatique : c’est celle de Botelho, située à seulement une quinzaine de km de Brasilia !!
Le site a considérablement évolué au fil du temps, comme on peut le voir ici à droite depuis quelques années et a multiplié ses hangars, au point de former de vraies allées à avions à certains endroits : en 2004 sa piste n’était pas en dur, et elle n’a été créée de la sorte qu’en 2013.
Les avions aperçus sur la « piste clandestine » sont parfois des jets en effet, comme celui-ci à gauche. C’est le Learjet privé et personnel du sénateur Angelo Coronel, le PP-CPN.
Un photographe à l’affût a vu en descendre Jacques Wagner, gouverneur de Bahia, que l’on ne présente plus ici depuis cet article. Wagner avait pris l’habitude auparavant de voyager dans l’avion de l’homme d’affaires João Carlos Cavalcanti, un milliardaire du secteur minier.
L’appareil, était le PT-WIV, un Bombardier Learjet 31A, le N°31-110.
Un autre cliché pris à la sauvette et au téléobjectif montre Bezerra Filho en train d’embarquer dans un Embraer Phenom qui semble être celui mis en vente par JLM Aviation de Boca Raton, Floride (on y revient !). C’est le N271ZP, annoncé à 1 850 000 dollars, revendu à JLM le 15 novembre 2019 par « N271ZP LLC Trustee », un ancien mexicain immatriculé XA-ASS ex XB-MUL en 2012 et ex XB-MRQ. Les deux immatriculations mexicaines qui se suivent sont très, très intéressantes car elles sont signées « Flying Fast SA de CV ». JLM ? Non, vous ne rêvez-pas, c’est bien la société de Joe Malago, un des principaux fournisseurs d’avions pour les trafiquants, comme on vous le dit ici depuis des années ! Encore elle, est-on tenté de dire !
« Selon l’Agence nationale de l’aviation civile (Anac), le District fédéral dispose de six aérodromes, principalement des pistes d’atterrissage dans les zones rurales » (on pense au site de l’aéroport Araripe de Macedo à Luziana, à une cinquantaine de km au sud, ci-dessous avec sa piste de 1 500 m) ;
« L’aérodrome de Botelho, dont la photo illustre le point culminant de cet article, possède la piste la plus longue d’entre elles, suivie de l’aire d’atterrissage et de décollage installée à Fazenda Lamarão, longue de 1 500 mètres (1). Selon un rapport publié par le journal Correio Braziliense en début d’année, la ferme, en marge de la DF-251, a été louée en 1982 pour des activités rurales au producteur José Ramos Botelho, qui tenait une ferme bovine sur le site. Au début des années 2000, la famille Botelho a construit et enregistré une piste d’atterrissage pour son propre usage. Face à la demande d’aéronefs, les occupants de la zone ont agrandi la structure et élargi l’utilisation de la piste d’atterrissage et de décollage.
En 2013, lorsque le Correo a révélé le projet, Aerodromo Botelho disposait de 65 hangars. Aujourd’hui, il existe plus de 100 espaces pour le stockage de petits avions. La piste du terminal mesure 1 700 mètres de long – l’équivalent de la zone d’atterrissage de Congonhas. Le futur aéroport exécutif de Brasília abrite plus de 250 avions, évalués à 20 millions de reais ». Gag en effet : en 2013, l’ANAC avait bien mené une enquête sur le site de Botelho en demandant « des éclaircissements au propriétaire sur l’extension de la piste et la construction de 65 hangars au sol sans que l’agence ait été mise au courant. L’Anac a déclaré qu’elle enquêterait également sur la question de savoir si la piste, qui reçoit environ 150 avions par mois, est exploitée commercialement, ce qui n’est pas autorisé ». En somme, ça ne fait que 7 ans aujourd’hui que ce qu’on fait là-bas est fortement teinté de magouilles… politiques !
(1) ce n’est pas le seul aéroport à avoir posé problème à l’ANAC. En 2013, on pouvait lire cet article à propos de celui de Jequié près de Bahia : « pouvons-nous pardonner le folklore et les artistes du genre, mais l’interdiction de l’aéroport Vicente Grillo de Jequié par l’Agence nationale de l’aviation civile (ANAC) servirait d’inspiration à la défunte écrivain de feuilleton, Lima Duarte, pour un modèle dans les traces du légendaire «cimetière de Sucupira», du feuilleton «O Bem Amado» (une télénovela dans les années 70). L’aéroport, qui était sous «l’administration et la responsabilité» de la mairie de Jequié, ancien gouvernement, a été fermé, en raison de l’insécurité révélée sur sa piste, où passent les personnes, les animaux et les motos, en plus de la qualité précaire de la piste. En raison de cette interdiction, le gouverneur de l’État, les députés qui ont participé à «l’Assemblée Itinérante» de la ville, entre autres passagers, ont dû atterrir à l’aéroport de la ville voisine d’Ipiau, à 56 kilomètres de Jequié. Au milieu de l’interdiction, d’autres avions ont déjà débarqué des passagers sur Vicente Grillo. Samedi (le 29 juin), le journaliste Júnior Mascote (Cidade Sol FM), a attrapé ainsi un avion modèle Cessna SII,
appartenant à la compagnie de taxi aérien débarquant à Jequié des musiciens du groupe Asa de Águia (ici à gauche), qui se produiraient à São Pedro de Itiruçu, fait répété à propos du groupe Aviões do Forró. Les pilotes de ces aéronefs prétendent toujours ne pas avoir connaissance de l’interdiction, malgré leur existence, à l’issue de l’atterrissage sur une piste marquée d’une croix signalant l’interdiction »…
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