Le plus dur étant de trier l’information, tant les services secrets Kazhaks, qui ne lâchent jamais leur proie, en inondant le net de désinformation. Mais à force de trop vouloir en faire, ils finissent aussi par régler certaines choses intéressantes, échappées aux observateurs traditionnels: le tout étant de faire la part des choses. Pour le cas du jour, c’est en tout cas tranché : l’ex oligarque Kazakh, réfugié un temps en France et emprisonné, n’a rien d’un expatrié politique, et tout d’un escroc , tout simplement, mêlé à un soutien à un trafic d’armes.
Nota : à ceux qui pourraient penser récupérateur l’association de la catastrophe du vol MH-370 dans le titre de cette longue série, je rappelle qu’à l’origine il y a la forte suspicion émise par l’un des parents de victimes françaises sur la possibilité que le Boeing 777 incriminé ait pu avoir eu affaire à un trafic de ce genre, ou à une bavure militaire liée à ce trafic. La série a débuté ici.
De vielles connaissances Lettones et ukrainiennes
Mais c’est un autre cargo, d’un autre type un RoRo, (Roll on, Roll Off). dans lequel on rentre et on sort en roulant) qui va nous donner la clé de ce commerce d’armes à grande échelle via toute une armada de cargos. C’est le MV Faina, un petit cargo de 13 870 tonnes de déplacement et de 10 931 tonnes de capacité d’emport battant pavillon de Belize. Comme équipage 17 Ukrainiens, trois Russes et un Letton sous les ordres du Capitaine Nikolsky. Les pirates montés à son bord ne se doutaient pas de ce qu’ils allaient trouver à bord : c’était pour eux un véritable lingot flottant ! Même à 67 500 dollars pièce le T-72 (le prix d’un gros SUV !), au tarif de vente de départ d’Ukraine, il y en avait en effet pour… 2 227 500 dollars ! Si on y ajoute les pièces de rechange, les camions et les affûts de DCA, on ne devait pas être loin des 3 millions !!! Tout cela mêlait en fait la Lettonie à cet export en masse d’armes. Du cargo, à Mombasa, voici en effet ce qu’on en avait descendu :
Avec le Roro bourré d’armes, était entré en lice un troisième larron, comme pays suspect. La Lettonie n’est certes pas en reste non plus pour ce qui est de faire circuler des armes légères… même si ce n’est pas la production en elle-même dans le pays qui retient l’attention mais c’est plutôt le rôle de ses banques dans le commerce ukrainien ou russe, qu’elle facilite grandement. Parmi les directeurs de ses banques, on trouve par exemple Erik Vanagels et Stan Gorin, dissimulés derrière une entreprise irlandaise (voici l’explication attendue à notre échouage de cargo !), un société appelée International Offshore Services, elle-même étroitement liée à ce que l’on peut appeler « le réseau Odessa ». Dans le très complet rapport « The Odessa Network », on donne en exergue une définition précise de ce qu’est ce consortium de vente et de distribution d’armes.
« Le réseau Odessa est un prestataire logistique pour les gouvernements de Russie et d’Ukraine, et non un marchand d’armes indépendant. Il travaille avec les agences nationales d’exportation d’armes telles que Rosoboronexport et Ukrspetsexport. Les dirigeants du réseau Odessa entretiennent des relations personnelles et financières avec les responsables des gouvernements russe et ukrainien, dont un conseiller personnel auprès de Poutine et des personnalités russes du secteur militaire et militaire. Odessa Network est centré sur un groupe de sociétés privées basées à Odessa qui effectuent régulièrement des transferts d’importantes quantités d’armes. Des sociétés de transport européennes et russes liées jouent un rôle spécialisé important dans le transport de cargaisons particulièrement volumineuses ou illicites. Le réseau est profondément interconnecté.
Le personnel et les équipements circulent fréquemment entre différentes sociétés et de nombreux membres du réseau sont des membres de la famille, des amis proches, d’anciens camarades de classe, etc. La grande majorité des envois d’armes partent du port ukrainien d’Oktyabrsk, spécialement construit par l’URSS pour transporter des armes (par exemple, c’était le point d’origine des missiles destinés à Cuba en 1963). Bien qu’elle soit située en Ukraine, Oktyabrsk est contrôlée de manière fonctionnelle par la Russie: le responsable du port est un ancien capitaine de la marine russe et le propriétaire du port est un oligarque lié au Kremlin.
Les agences nationales d’exportation d’armes et les réseaux d’Odessa Network travaillent à Oktyabrsk. Les entreprises ukrainiennes exercent également des activités licites (courtage de fret, équipage, affrètement, etc.) et opèrent dans des centres maritimes mondiaux tels que Hambourg, Rio de Janeiro, Singapour et Dubaï. Pour protéger leurs livraisons d’armes, les entreprises ukrainiennes possèdent plusieurs sociétés privées de sécurité maritime qui opèrent également dans des zones de conflit en Afrique. » Bref, c’est toute une organisation que l’on va découvrir grâce à des… pirates. Des somaliens, venus aborder le Faina et qui vont grandement aider à découvrir ce réseau inextricable au départ. Ce que l’on va découvrir c’est donc l’implication de trois Etats (La Russie et l’Ukraine, la Lettonie leur servant d’intermédiaire) et des banquiers d’affaires sans scrupules.
La filière ukrainienne
C’est ainsi par exemple que l’on va découvrir que deux d’entre eux, Erik Vanagels et Stan Gorin, ont financé le cargo Faina pour son propriétaire légitime, Valery Alperin, alias (alias Vadim Oltrena (ici à droite il en descend, à Mombasa), un cargo découvert rempli de chars d’assaut T-72, mais aussi de canons de DCA, de rockets de type Grad, et de cinq containers de fusils AKM (des Kalachnikovs, donc, voir les photos dans ce chapitre, toutes issues du déchargement du cargo à Mombasa).
Pour passer inaperçu, le navire d’Alperin, acheté sur vente aux enchères de l’Etat au temps de Boris Yeltsin, était placé au bout d’une série de sociétés imbriquées les unes dans les autres… comme des poupées russes, serait-on tenté de dire. Valery Alperin possédant la nationalité israélienne, doté d’un passeport israélien, il faut aussi le noter (on rejoint ainsi notre épisode sur la liste de vendeurs d’armes venus d’israël).
Le Faina était ainsi inscrit au nom de Almar Shipping, sous la houlette de Williston Line, elle-même dirigée par Williston Impex Corp, et elle-même sous-traitante d’Integri SA, la société panaméenne de Gorin–Vanagels, surnommés à juste titre les « latvian proxies » !!! Alperin dirigeant aussi Tomax Team Inc. Pour charger leur mule, on peut aussi rappeler comme cela a été fait que « Loginex Projects, une société créée par Gorin and Ireland’s Overseas Acquisitions et Milltown Corporate Services de Goragel, a été désignée, dans une décision de la Haute Cour britannique, en octobre 2011, comme l’une des nombreuses entreprises utilisées par Mukhtar Ablyazov, ancien président de la Kazakhstan Bank BTA, qui a placé un peu plus de 1 milliard de dollars sur un compte Trasta Komercbanka, basé en Lettonie » (le 2 mars 2016, la licence de la banque, anciennement Riga Bank, a été révoquée pour manquements graves : « L’OPCRP a indiqué dans son enquête que Trasta Komercbanka était la destination européenne des milliards de dollars détournés de la Russie. Selon ce rapport, une série de sociétés et de banques ont acheminé de l’argent vers Trasta Komercbanka via une piste de papier compliquée. C’était le cas: une entreprise ne remboursait pas son prêt, laissant une ou plusieurs sociétés russes et un citoyen moldave responsables de la dette. Les tribunaux moldaves certifieraient la créance au moyen de faux documents ou de documents incomplets et ordonneraient à la société russe de payer. La sanction judiciaire a permis à de l’argent volé d’entrer légalement dans l’Union européenne (UE) via Trasta Komercbanka ». Et voici le Kazakhstan qui s’ajoute aux trois pays déjà cités ! Nous sommes désormais à quatre pays impliqués !!! Et une autre entrée sulfureuse dans la danse des vendeurs d’armes et de ceux qui investissent en eux !!! Et cette fois, on ne parle plus de millions de dollars. Mais d’un milliard !!!
Le gros poisson kazakh, ou le tombeur tombé…
Celui-là, c’est le gros poisson de l’affaire, en effet. A Big, Big Fish, comme disent les anglo-saxons ! Un gros poission qui a finalement été pris dans un filet français comme on va le voir. Avec lui, on va tomber dans la manipulation extrême, et les tabloïds, vu son comportement une fois devenu fugitif. Moukhtar Ablyazov est un ancien ministre de l’Énergie, du Commerce et de l’Industrie dans le gouvernement de Noursoultan Nazarbaïev, devenu depuis son ennemi juré, qui a été condamné par défaut en juin 2017 à 20 ans de prison au Kazakhstan pour malversations diverses et la fuite de milliards de dollars de son réseau de banques (on parle de 6 à 9 milliards de dollars, un montant faramineux déposé dans des comptes offshores disséminés un peu partout, dont les enquêteurs peinent à retrouver la trace… et le nombre, dont celui de la Trasta Komercbanka qui n’a pas survécu à ses malversations !!!). Sans oublier les manipulations plutôt particulières pour devenir le seul dirigeant de la banque BTA : en décembre 2004, Yerzhan Tatishev, son (jeune) propriétaire d’origine (ici à gauche) était en effet mort subitement dans un accident de chasse resté fort douteux (1), et sa veuve lui a cédé bien vite ses parts, laissant planer le doute sur ses raisons véritables (ici les condoléances à son décès, formulées par notamment le Credit Suisse, Fortis Bank NV/SA,ING, HSBC, Euromoney ou l’Islamic Development Bank et l’European Bank for Reconstruction and Development).
Une ascension trop rapide pour beaucoup : « on » avait fait visiblement pression sur elle, des pressions sur lesquelles tous les regards portaient sur son successeur, à l’ascension exceptionnelle.
Après qu’il ait fui le pays, l’Angleterre comme la Russie ou l’Ukraine avaient lancé des mandats d’arrêt contre lui chez Interpol, l’accusant d’avoir spolié des milliers de personnes, celles qui avaient emprunté à sa fameuse banque BTA. Mais Moukhtar Ablyazov avait une explication, somme toute simple à donner, à sa fuite précipitée : « Nazarbaïev exigeait que je lui cède gratuitement 50 % des parts de la banque. J’avais refusé. C’était la plus grosse banque de la Communauté des Etats indépendants [CEI, une partie des anciennes républiques soviétiques], avec un capital de 4 milliards de dollars. Pour mon malheur, Kommersant [journal d’affaires russe] a écrit que j’avais des projets en Russie, estimés à 23 milliards de dollars. Nazarbaïev a eu peur. Il m’a dit : «J’ai peur de tes milliards. Tu peux me confisquer le pouvoir en investissant cet argent dans l’opposition.» Il était franc. Il m’avait prévenu : «Je n’ai pas besoin de dividendes, j’ai besoin de te contrôler. Si tu ne mets pas la banque à mon compte, je te la confisque.» Bien entendu, il est le seul à pouvoir le confirmer. Et pas mal de gens d’en douter, de cette version unique des faits. A droite, sa luxueuse propriété anglaise d’Oaklands Park, près de Londres.
Pas le seul a avoir détourné des montants faramineux au Kazakhstan
L’homme était donc depuis en fuite, avec derrière lui un montant faramineux de détournements comme on l’a dit. L’explication de son départ demeure oiseuse, même quand on connait l’appétit du président kazakh et sa mentalité, qui consiste à ce que personne ne peut lui résister. Car notre fugitif a bien placé son argent quelque part, dans des comptes offshores bien dissimulés, pour maintenir un train de vie conséquent : en France ce n’était pas une mais trois villas de taille respectable qu’il avait acheté sous un faux nom pendant son séjour. Mis en prison, il aurait continué à gérer ses affaires, comme un mafieux de quartier, distribuant à distance de l’argent ici et là. Le phénomène n’est pas isolé au Kazakhstan, où l’économie sans régulation aucune a donné lieu a des excès pendables dont beaucoup de gens ont profité (on nommera rapidement ici un ancien président français, englué dans une sombre histoire de vente d’armes…).
Un autre banquier Kazakh gérait aussi les siennes à sa façon, ou plutôt de la même façon : Jahangir Hajiyev (ci-desssus à gauche), responsable de la banque d’Etat (International Bank of Azerbaijan (IBA)) de 1993 à 2015 avant d’être jeté en prison pour détournements (9 milliards de dollars). Comme salaire étatique (le gouvernement ayant 52% des actions), il ne touchait pas des masses comparé à ses voisins européens : 70 000 dollars par an seulement. On ne comprend donc pas comment il avait pu amasser des propriétés en Angleterre valant 22 millions de livres ou comment il avait réussi à s’acheter un jet Gulfstream G550 à 42 millions de dollars. Mais à son sujet, il y a pire encore, ou plus affligeant… le magasin Harrods a révélé en juin dernier qu’une femme avait dépensé dans son seul magasin londonien jusqu’à 16 millions de livres en dix années d’achats répétés (ça fait une moyenne de 4 000 livres par jour : 4 500 euros !!!). Repérée grâce à une toute nouvelle loi traquant l’argent sale appelée « Unexplained Wealth Order » (c’est la première à l’être), son nom était resté jusqu’il y a peu de temps secret. Harrods l’appelait depuis des années « la femme de Monsieur A ».
Le 10 octobre dernier, son masque tombait : ce n’était autre que Zamira Hajiyeva, l’épouse de Jahangir Hajiyev (ici à droite)!!! Elle avait acheté une maison à quelques centaines de mètres du magasin, en 2009, en versant d’emblée 4 millions de livres et en résiliant un crédit de 7,4 millions en moins de 5 ans ! Une maison dans le quartier fort chic de Belgravia achetée par Vicksburg Global Inc, une compagnie immobilière installée dans les Iles Vierges !!! Elle dépensait compulsivement : en un jour, elle avait dépensé par exemple 150 000 livres chez la joaillerie Boucheron et une autre fois 100 000 chez Cartier. Elle s’était aussi offert en 2013 le Mill Ride Golf Club acheté 10.5 millions de livres via une société écran basée à Guernsey. Son mari lui refilait 20 000 livres par mois pour ses menues dépenses… En octobre, le Daily Mail s’amusait à calculer ce qu’elle portait sur elle lorsqu’elle sortait le matin son chien et évaluait le tout, cabot y compris, à plus de 10 000 livres. Son indécence était flagrante, car l’argent provenait toujours des vols d’avoirs kazakhs de son mari jeté en prison (le quotidien droitier s’extasiant en même temps sur les tenues journalières de Meghan Markle dégitées par sa styliste attirée) ! Voilà donc ce qui se passait aussi au Kazakhstan : des détournements massifs d’argent.
Le kidnapping révélateur des mœurs du pays
A Bakou, Zamira Hajiyeva avait connu un autre épisode de la folle vie Kazhak : elle avait été kidnappée… contre rançon, bien sûr, en 2005 (d’où son exil anglais l’année suivante, qui devient… compréhensible). Présenté comme un crime purement mafieux, on découvrira que son auteur était l’officier de police Haji Mammadov, son propre garde du corps, appartenant à une bande criminelle mais aussi en même temps officier de police du ministère de l’Intérieur. A son procès, Mammadov et ses complices dénonceront comme commanditaire Zakir Nasirov, le chef du département des enquêtes criminelles du ministère de l’Intérieur ! Pour expliquer un peu les mœurs violents régnant dans le pays, il faut savoir que ce même Mammadov, accusé également d’avoir froidement assassiné Azer Ismayilov, chef du Département Antidrogue du pays, n’exprimera aucun regret son égard à son procès. Dans le prétoire, il était allé d’une phrase défiante, n’ayant plus rien à espérer : « si je nomme ici les noms des personnes qui ont ordonné les assassinats, il y aura pas de place pour eux dans la cour. Il y a des gens qui assistent à ce procès qui savent qui a ordonné les assassinats ». Il expliquera son geste : J’ai décidé d’assassiner Shairkhan après avoir découvert qu’il voulait me tuer. Je l’ai drogué après lui avoir lié ses bras. D’abord, je pensais que je parlerais avec lui et le tuerais ensuite. Je l’ai emmené dans la région de Gusar. Et après, il est mort d’overdose… ». La majeure partie des assassins, dont Mammadov, ont été condamnés à la perpétuité ce jour-là. Mammadov possédait un centre de vacances à Garaboulag, où venaient se reposer des ministres, et on l’a aussi accusé de faire régner la terreur et d’avoir assassiné des membres d’une bande de tchétchènes, ainsi que des habitants de la colonie de Saray Novruz Ismayilov et de Mekhman Samadov. On cite des kidnappings et 11 meurtres à son actif, dont celui d’un enquêteur de la police, Rovshan Aliyev et celui du vice-president de l’Azerbaijan’s Association of Soccer Federations, Fatulla Huseynov. Tels étaient alors les mœurs « politiques » à Bakou… plutôt violents !
Se méfier des blondes
Chez ces forbans, il n’y a pas d’autre mot possible, tout en effet a été détourné. On a beau présenter l’homme fort du pays Noursoultan Nazarbayev comme un véritable tyran autoritaire, qui traque tous ceux qui se sont mis en travers de lui, ce qui est vrai, il n’empêche, Moukhtar Ablyazov, contrairement à comment il se présente désormais, a bel et bien spolié son propre pays et dissimulé sa fortune, volée au pays. Et pour cela aussi n’a jamais cessé de manipuler les individus, recrutés dans le but de passer au travers des filets de la justice kazakh (ou anglaise). Le plus bel exemple est celui d’une avocate plutôt bien de sa personne, passée au service d’Ablyazov à la surprise générale. Ce dernier a en effet bien été aidé par Avakov Elena Tishchenko, née Baranova, une avocate (en fait c’est bien une divorcée, d’un millionnaire, et devenue semble-t-il pour les enquêteurs français la maîtresse d’Ablyazov). Son ex-mari s’appelant Sergey Tishchenko. Ils ont eu ensemble quatre enfants.
Un cas étonnant
Son cas, étonnant, frise l’incompréhension. Alors que le sulfureux financier kazakh est déjà arrêté en France, en 2013, la voici qui suit le même chemin en Russie, où on la soupçonne d’avoir aidé à dissimuler près de 300 millions de dollars (au minium) au profit de celui qu’elle défendait déjà. Elena Tishchenko, a en effet été interpellée à Moscou à l’hôtel Baltchug le 30 août suivant l’arrestation d’Ablyazov, juste arrivée de Nicosie. On la voit en robe moulante porter des menottes (ici à gauche), ou défiant du regard les journalistes derrière des barreaux. Mais, surprise, elle sera relâchée au lendemain de Noël sur décision du Bureau d’Investigation du Ministère de l’Intérieur Russe. Pourquoi, on l’ignore : mais elle connaissait tellement de secrets à propos de son employeur que ça peut s’expliquer… On lui avait demandé au départ de verser 439 millions de dollars si elle voulait retrouver la liberté, ce qu’elle n’a donc pas eu à faire ! Au passage en Russie, elle en a profité pour divorcer de Sergey, qui lui est devenu entre temps le responsable de la Soyuz Bank, dans laquelle un certain Oleg Deripaska a beaucoup investi en 2010 (il y a englouti en effet 84,43 millions de dollars !). Deripaska, on le rappelle, ce proche de Poutine, était aussi en contact avec un certain Paul Manafort… Lors de l’arrestation d’Elena en Russie, on a assisté à de bien étranges choses et les rares compte-rendus ont été plutôt perturbants. Ainsi, interrogée par exemple sur les sociétés « LLP Panorama PC »et LLP« Rakurs PC » notablement financés par des fonds d’Ablyazov, via deux sociétés russes, LLC« Runa TV » et « LLC Studiya na Pokrovke « , elle avait répondu connaître ces sociétés, en effet. Or LLP «Rakurs PC» n’avait été créé qu’en octobre 2013, au moment même où Elena était arrêtée en Russie. Que savait-elle donc d’une entreprise qui n’existait même pas avant son arrestation ?
Un port dans la glace fort convoité
En Russie, on lu avait surtout posé des questions sur le blanchiment d’argent en particulier de l’entreprise chypriote Salvino Servises Ltd., qui possède plusieurs propriétés de moins de 3 000 hectares enregistré à Podolsk, située non loin de Moscou, administrée par Rinat Ablyazov Batyrgareeva Batyrgareeva et son épouse Galina. Ablyazov devait y implanter un centre commercial… or il avait en réalité vendu des terres agricoles ne valant rien comme étant des terres constructibles viables, un vieux procédé. Des terres facturées sept fois la mise, grâce à des complicités locales, gagnant au passage 750 millions de dollars !!! Evidemment le projet commercial n’a jamais démarré, mais il lui avait permis d’évacuer plus de 400 millions de dollars d’investissements détournés aux Seychelles (et récupérés par son beau-fil). Outre le parc logistique Kolpino de Saint-Pétersbourg, et le centre commercial inachevé de la gare Paveletsky à Moscou, d’autres terrains à Moscou et du district de Domodedovo dans la région de Moscou, ainsi que des terrains et des logoparcs inachevés dans les régions de Sverdlovsk, Novossibirsk et Volgogra composaient les investissements russes détenus par Ablyazov. Bref, il y a avait de quoi poser plein de questions.
Mais c’est l’histoire d’un port sur la Mer Blanche qui semble les avoir beaucoup plus intéressés. C’est tout un montage complexe, cette histoire dans l’histoire. En août 2008, la banque BTA avait en effet investi 120 millions de dollars (?) pour l’achat de la société Usarel Investments Ltd., société portuaire chargée du port pétrolier de Vitino, capable de recevoir des pétroliers de 40 000 tonnes et appartenant à Lux Investment, détenue à 51% par la structure d’Ablyazov et à 49% par les managers Pukhlikov and Sheklanov (en fait les dirigeants de BTA-Kazan bank, filiale de BTA !), les initiateurs du projet. Sheklanov étant un autre beau cas d’espèce : ce multi millionnaire russe, pour marier sa fille Ekaterina (avec Yuri Korolev) en 2014 sur l’île de Mykonos, avait organisé une fiesta mémorable, avec en invité le rockeur glam-rock sur le retour Chris Norman, ex Smokie (c’était insupportable, sorte d’Abba cheap, franchement). Une vraie scène de tournée de rock, avec force semi-remorques, pour un mariage !!!
Dans un magazine appelé Barents Nova, en février 2012, Ablyazov avait bien été crédité comme étant le propriétaire du port, en effet, et on craignait alors de le voir jeter en prison au Kazakhstan. Selon le mari d’Elena, une fois Ablyazov parti, c’est son ami Andrei Vorobyov d’IPSG Chrysopa (Chrysopa Holding BV est une société hollandaise) qui avait alors logiquement réclamé l’argent qu’il avait prêté au départ à Usarel. L’histoire répétée du prêt à rembourser chez Ablyazov !!! Et c’est comme par hasard Elena Tischenko qui avait représenté les intérêts d’IPSG devant un tribunal londonien, en cherchant à éviter la saisie. Or, coup classique, on découvrira après coup que Chrysopa Holding BV, une partie d’Eurasia Group appartenait en fait aussi à Ablyazov !!!
Le procédé étant connu chez lui, en effet, de racheter ses propres entreprises pour rebondir plus loin après : un véritable cavalerie stratégique. En 2012, par chance, la société Valenora, qui cette fois ne semble rien avoir à faire avec le tycoon, propose de racheter la dette de l’IPSG Usarel en proposant de « rembourser le prêt à la banque Chrysopa pour un montant convenu égal à la valeur marchande du port. Selon les estimations des experts, 70 millions de dollars, indiquait Valenora ». Or à ce moment-là, le tribunal londonien a statué pour le remboursement total de l’argent des parts d’Ablyazov, bloquant tout le processus. On notera la somme : on parle de 70 millions de dollars là…
Mais pourquoi donc ce choix du port excentré au nord de Vitino, voilà bien la question (ici en 2003 à ses débuts, cité dans un rapport sur le pétrole en mer ce Barents) : situé très, très, au nord, sur la côte de la mer Blanche, dans la baie de Kandalakshskaya, il est navigable toute l’année à l’aide de brise-glace ou de remorqueurs pour casser la glace. Ses quais ont une longueur totale de 512 mètres, avec une entreprise de manutention (« OOO Sea Port », à usage exckusif de Vitino) y travaille. En préfiguration du prochain marché autour du Pôle Nord, c’est en effet un investissement de poids. Tout le dossier des futurs investissements russes, tournés vers la région est lisible là... Le changement climatique aidant, il est évident que le commerce par cargo va se déporter loin au nord ! Notons aussi que la plupart des cargos livreurs d’armes sont aussi et déjà des brise-glace (navigant en Méditerranée !), tel le Monchegorsk, surpris plein de poudre à Chypre en 2009. Ce qu’il avait apporté finira par exploser deux années plus tard.
Pour en revenir à notre blonde, qu’avait-elle donc en revanche négocié pour être libérée, on ne le sait exactement… Qui exactement a décidé de la faire sortir ? On connaît l’entourage de Poutine : quel accord a-t-elle négocié avec eux, cela reste fort mystérieux (on en a une petite idée ici, avec la signature d’un texte destiné au KNB Kazakh : toute une série d’aveux, il semble bien, impliquant par la suite des dizaines de personnes opposées au régime kazakh (3). Une attitude surtout à revoir en regardant la suite d’un tout autre œil…
Sélectionnée pour diriger l’anti-corruption !
Car, deuxième grande surprise, alors qu’elle est toujours avocate et revenue libre au pays en Ukraine, la voici choisie par le ministre des Affaires intérieures Arsen Avakov (qui a fait partie de Notre Ukraine, le parti dirigé par le président Viktor Iouchtchenko, il a aussi comme ami Iliya Kiva, le chef de la police anti-drogues et militant néonazi !) pour diriger un organisme ad-hoc chargé de faire la chasse à l’argent perdu par le pays, emmené ailleurs par des entrepreneurs peu scrupuleux. Elle est en effet nommée à la surprise générale chef de la cellule anti-corruption, chargée par Avakov de récupérer en priorité les fonds publics ukrainiens dissimulés par l’ancien ministre de l’Environnement, Nikolay Zlochevsky (du Burisma Group, fondé à Limassol à Chypre, dont 23 millions d’euros, seront effectivement libérés par la Haute Cour d’Angleterre en janvier 2015). A propos de son emprisonnement en Russie, Avakov parle alors « d’incident malheureux », ce qui est pour le moins surprenant, et l’encense littéralement en la présentant : «c’est un une personnalité brillante et exceptionnelle et est proportionnelle aux tâches à accomplir dans cette unité de spécialistes. Cette personne sera efficace et nous aidera à restituer les avoirs illégalement exportés d’Ukraine », a déclaré le chef du ministère de l’Intérieur sur sa page du réseau social » avait-on pu lire à son propos. Elle était pourtant passée dans le camp adverse alors qu’elle occupait déjà le poste-clé de fonctionnaire en Ukraine, depuis neuf ans déjà, en qualité en effet d’employée du secrétariat du comité anti-corruption de Rada, le parlement monocaméral d’Ukraine (à une seule chambre législative (ce qui a été vu par certains comme une belle planque en fait (2)) !!!
Elle travaillait donc en même temps comme avocate pour l’homme d’affaires kazakh, alors que la loi ukrainienne sur la fonction publique locale lui interdisait pourtant de combiner la fonction publique avec une activité commerciale !!! Fait notable, elle est aussi diplômée de la London School of Economics and Political Science, spécialisée dans les crimes financiers internationaux !!! On peut la voir ici (à droite) à Kiev, le 25 avril 2014 lors d’un débat qui avait comme question du jour « quand donc un bureau anti-corrution va-t-il marcher en Ukraine ? » tenu juste après l’arrestation de son mentor ! Sidérant ! Très adroite, elle aurait aussi réussi à soudoyer pendant ce temps-là Natalia Gorbunova, une juge chargée de l’affaire Ablyazov, à qui elle aurait remis un joli pot de vin. Ablyazov ne pouvait espérer meilleur soutien ! Quelle efficacité !
Un incroyable talent
Elena Tishchenko est une femme qui ne manque pas de culot, en effet ! Le jour où elle a démissionné de son poste anti-corruption, voici ce qu’elle a en effet osé dire devant les caméras d’une chaîne de TV, retranscrit ici intégralement par Politrada.com (quel aplomb elle affichait !) : « En dépit de l’efficacité du ministère des Affaires intérieures dans le maintien de la sécurité publique, le système de maintien de l’ordre ukrainien ainsi que le système judiciaire maintiennent une corruption critique et ne sont pas prêts pour la restitution des avoirs acquis criminellement par le régime de Viktor Ianoukovitch », a-t-elle déclaré. Tishchenko a énuméré les succès remportés par la direction depuis sa création. Comme elle l’a noté, 80,5 millions de dollars US ont notamment été retrouvés dans les comptes lettons de sociétés offshore détenues par Sergey (Serhiy) Kurchenko (lui aussi est parti avec la caisse, selon Wikipedia : « faisant l’objet d’un mandat d’arrêt dans son pays pour fraude fiscale, il n’a plus donné signe de vie depuis mars 2014 »). Les actifs de Sergey Kurchenko, un certain nombre de ministres du gouvernement de Viktor Ianoukovitch en Europe, d’une valeur de plus de 200 millions de dollars américains ont été découverts. Dans le même temps, le responsable du ministère de l’Intérieur a déclaré que l’administration qu’elle dirige « ne peut exister dans un vide procédural et politique ». « En Ukraine aujourd’hui, les entreprises et les établissements bancaires appartenant à la famille de Ianoukovitch, appartenant à son environnement, travaillent librement et notre loi n’autorise pas les forces de l’ordre à confisquer cette propriété », a-t-elle déclaré. « Nous avons besoin et avons immédiatement besoin de changements législatifs très sérieux, mais l’attention de la société est plutôt détournée vers d’autres initiatives législatives prévoyant la création d’organes réguliers et inefficaces, qui sont en outre invités à offrir des possibilités de corruption à de tels organes », a déclaré Tichchenko. Rappelant son intention de créer une agence pour la restitution des actifs et leur élimination. Elle a déclaré un certain nombre « d’attaques d’informations dirigées contre le gouvernement que je dirigeais, et contre moi personnellement, et ces attaques ont été couronnées de succès « (3). « Cela a affecté à la fois la direction que je dirige et les résultats de son travail, ainsi que les initiatives législatives et leur adoption. C’est pourquoi, parce que ce poste n’a jamais été un objectif pour moi, mais l’objectif était le retour des fonds, aujourd’hui, j’ai déposé une lettre de démission « , a déclaré Tishchenko. En somme, pour elle la société urkranienne, minée par l’affairisme systématique d’un Ianoukovytch ne peut être réformée. Il est vrai que sa marque est encore partout dans le pays, et que ses hommes restés en place font tout pour sauvegarder leurs prérogatives… et leur argent. Mais elle-même est tombée aussi dans un travers… évident. Dans son allocution, en citant Kurchenko, elle avait bien sûr omis de préciser que son propre mari en avait largement profité…
Car le journal de préciser plus loin qu’elle était bien divorcée, mais qu’elle était aussi sur la sellette, désormais : « elle et son ex-mari ont été impliqués dans plusieurs scandales, notamment sur la vente du pétrole confisqué de Kurchenko à prix réduit. En outre, Tishchenko a comparu dans l’affaire de plusieurs millions de dollars de fraudes de l’homme d’affaires kazakh Mukhtar Ablyazov, qui est actuellement examinée par un tribunal britannique. En outre, il est connu que Tichchenko est copropriétaire de deux domaines en France et un en Angleterre »... Ah tiens, les voilà enfin, les fameuses villas !!! En France, elle est en effet co-propriétaire avec son mari « via la SCI du Grand Chêne », selon la presse ukrainienne. En Angleterre, la villa qu’elle détient à Weybridge (en co-propiété avec son ex-mari) est affichée à une valeur de 5 millions 400 000 livres sterling. Pour une simple fonctionnaire, avouez que c’est un luxe assez particulier… Un site moqueur commente son intervention télévisée : . « au printemps dernier, Elena Tischenko est devenue célèbre pour avoir tenté de justifier la dissimulation de son compte de résultats par les médias. » Son passage devant les caméras avait bien marqué » les esprits, et surtout ses détracteurs, absolument pas du tout persuadés de son efficacité ! Et persuadés de sa culpabilité, plutôt !
Un vrai roman policier
Son soutien à l’oligarque kazakh va être l’objet d’un vrai roman policier, pour découvrir où se cachait le millionnaire fugitif. Sa relation avec lui ne semblant pas être que professionnelle, en effet. C’est en effet finalement en France, à Mouans-Sartoux (près de Grasse),
qu’Ablyazov, alors toujours en fuite, a fini par être arrêté le 31 juillet 2013 : et c’est en suivant la belle descendre en France dans une riche villa de Saint Basile à Mougins, proche de celle où se cachait l’oligarque, que des enquêteurs privés de chez Diligence, dirigée par Trefor Williams, avaient retrouvé la trace du fugitif, arrêté alors qu’il était en train de refaire son lit, son avocate, arrivée en short et hauts talons, une tenue plutôt provocante remarquée par tous les enquêteurs, elle était tout juste repartie lors de l’arrestation (soupçon supplémentaire : pourquoi ne pas avoir arrêté les deux en même temps ?). Selon le Nouvel Obs, avant son arrivée, ils avaient aperçu auparavant Ablyazov occupé à couvrir le lit de pétales de roses !!! On nageait alors en plein magazine Gala ou dans le milieu des People, qui adore ces attitudes grotesques. L’homme était devenu un peu replet (cf la photo à droite, le jour de son arrestation : la vie de fugitif millionnaire semble avoir été tranquille chez lui) et moustachu, presque méconnaissable (ici à droite) ! A gauche, au chapitre au dessus, la villa Neptune, sur la côte d’Azur, dans laquelle avait été « logé » Ablyazov par les policiers français et l’agence de recherche privée anglaise. Pas vraiment discrète, la villa, c’est le moins qu’on puisse dire !
Comment avait-il pu vivre à cet endroit sans éveiller la moindre attention est un autre mystère de cette incroyable saga. Comment la DGSI française, par exemple, a-t-elle pu la rater ? Mystère !!!! Auraient-ils confondus avec une autre Elena Baranova, installée à Nice, puis à Monaco, et qui est-elle médecin, née à St Petersbourg et qui n’a rien à voir avec cette affaire ? Pourtant, un site ukrainien a bien révélé le nom de la société immobilière des époux Tishchenko et son adresse précise (ici à gauche), gérée par une dénommée Elena Sakharuk. La société à 100 euros de capital seulement, a été radiée le 22 juin 2017. Son adresse en fait pointait sur une société de domiciliation niçoise appelée « MailsBoxesEtc » (ici à gauche).
Quant au nom Sakharuk, il est aussi lié à Croisette Invest, installé Cannes, Nandelieu et la Napoule : c’est une gérant immobilière locale. Il n’y a pas, elle est très forte, l’Elena ! Ils sont très forts, plutôt devrait-on dire ! La preuve encore : à Paris, alors que l’on débattait au Conseil Constitutionnel de son sort, qui donc était apparu pour le défendre aux côtés de son fils et de l’avocat Jean-Pierre Mignard ? Gary Kasparov en personne !!! Quand je dis très fort... Mais on peut aussi s’interroger : finalement, et si la belle avocate n’avait servi que d’appât ? C’est aussi une possibilité !, à en faire poli
Tout cela coûte cher, très cher en procédure
L’annonce a été faite en Angleterre dans un site spécialisé, et reprise ici en Ukraine : défendre l’indéfendable coûte cher, très cher. Mais la masse colossale d’argent extraite du Kazakhstan est telle que ça ne représente que peanuts pour Moukhtar Ablyazov . Il n’empêche, « l‘ancien président du conseil d’administration de la BTA Bank, Mukhtar Ablyazov, accusé d’avoir volé 4,5 milliards de dollars au Kazakhstan, a refusé de fournir des services au cabinet d’avocats Stephenson Harwood, qui représentait auparavant les intérêts d’un homme d’affaires du Kazakhstan lors d’un litige à Londres, écrit The Lawyer. La société britannique Addleshaw Goddard va maintenant prendre la défense d’Ablyazov devant les tribunaux. Comme le note la publication, à la suite de la résiliation du contrat, Stephenson Harwood pourrait perdre une partie importante de ses revenus. C’est ainsi qu’en 2010 que la société a gagné environ 20 millions de livres sterling (environ 31,5 millions de dollars) en défendant Ablyazov devant les tribunaux. Selon la source, la décision de changer de cabinet d’avocats a été prise en raison de la faible efficacité de Stephenson Harwood. Comme le note l’avocat, parmi les créanciers de la BTA Bank, il y avait des grandes entreprises telles que RBS, Barclays et Morgan Stanley, dont les représentants accusent Mukhtar Ablyazov d’avoir volé leurs fonds »… Vingt millions de livres de dépensées pour se défendre… alors que dans Libération, le même Moukhtar se présentait comme désormais « pauvre à en faire pleurer dans les chaumières » ???
Filée de près pendant des mois
Dans le dossier, les enquêteurs anglais avaient versé la photo prise à Londres d’une des tenues d’Elena, une robe voyante zippée du haut en bas dans le dos (cf ici à gauche, le Daily Mail ne l’avait montrée que de face, la trouvant peut-être trop provocante pour ce journal pourtant habitué à dévoiler d’autres cas plus sulfureux ou dans des tenues bien plus aguichantes !). Le détectives de Diligence avait suivi classiquement le vieil adage des filatures : « suivez la femme », tout simplement !!! Et ça avait marché !!! Ablyazov, toujours marié, sa femme retournée par les italiens de force au Kazakhstan avec leur fille, était aussi semble-t-il un tombeur.
L’argent rend irrésistible, c’est bien connu, mais beaucoup pensent qu’à l’origine des déboires de ses conquêtes, il y a aujourd’hui la jalousie de sa femme, Alma Shalabayeva, justement ( à droite avec leur fille, il y a quelques années déjà, c’est aujourd’hui une jeune fille). A noter qu’on avait retrouvé en Italie, où elle s’était réfugiée un temps avec son mari, un faux passeport diplomatique de la République Centrafricaine au nom d’Ayan Alma, qui semblait grossièrement imité, comme on en retrouvera au nom d’Ablyazov, toute la famille s’apprêtant alors à partir en Afrique, semble-t-il… avec de faux papiers ! Les Kazakhs avaient obtenu son extradition, acceptée par le gouvernement italien qui s’était rétracté après. Elle avait été là-bas emprisonnée puis relâchée, pour revenir en Italie, plutôt furieuse…
Depuis, le cas juridique du tycoon, qui ne l’avait pas rejoint, traînait en France, bien aidé par une armada d’avocats. Ça traînait en effet, et le Conseil d’Etat lui donnait même un coup de pouce inattendu le 9 décembre 2016, le libérant en même temps de prison : c’était gagné pour lui, aperçu tout sourire au sortir de la prison de Fleury-Mérogis (ici à droite) ! Son avocat canadien, lui aussi très adroit, avait fait jouer le fait qu’on ne peut extrader en France pour des raisons politiques, ce dont l’oligarque s’est empressé de se réclamer, bien sûr !!!
La décision du Conseil d’Etat, il faut le remarquer, ayant retenu non pas une, mais deux pressions : « « la procédure d’extradition a fait l’objet d’une concertation réitérée entre les autorités russes et kazakhes au cours de l’instruction ». En somme, en France on reproche à la Russie d’être intervenue pour récupérer l’oligarque (et son argent dissimulé en Russie) alors que cette même Russie avait fait libérer celle qui savait où il se trouvait : avouez que c’est cocasse, sinon totalement incompréhensible !!! L’adresse de ses avocats étant aussi de s’être appuyés sur Nils Melzer, rapporteur aux Nations Unies (ONU), qui avait évoqué le fait que s’il l’était, extradé, voici ce qui l’attendait, à savoir en conseillant de « s’abstenir d’extrader un individu vers un pays où il y a des motifs sérieux de croire qu’il risque d’être soumis à la torture ». En conclusion, le cas de ces incroyables mafieux (je ne vois pas d’autre qualificatif, à voir leurs multiples dissimulations) est si important, que n’importe laquelle des décisions juridiques les concernant est un casse-tête international (comme ça a pu l’être en Italie et en France). En ce sens, ils sont devenus… quasi intouchables !!! Bardés d’une équipe d’avocats capables de mettre à genoux des Etats devant eux !!! L’argent, au-dessus des lois ? On n’ose l’imaginer. On y est, pourtant, avec cet exemple flagrant ! C’est à ce stade, il faut bien le dire, au même rang que les plus gros trafiquants internationaux de cocaïne !!!
(1) en 2018, Mediapart affirmait que Murathan Tokmadi, un homme d’affaires Kazakh, à la tête du racket connu sous le nom de Deputatsky Korpus, un groupe criminel, a accepté de plaider coupable pour le meurtre, effectué selon lui sur les ordres de Moukhtar Abliazov. Il aurait reçu 4 millions de dollars pour ce forfait. En 2017, pourtant, Moukhtar Abliazov. avait été retiré des listes rouge des recherchés par Interpol. Il est défendu par Peter Sahlas. L’avocat est aussi à la tête de la Fondation Pierre Elliott Trudeau, et connait très bien la Russie. Selon lui « « C’est un authentique opposant dont le seul crime est d’avoir osé tenir tête à un dictateur ». Le le 12 juillet dernier c’était pourtant un de ses anciens supporters, Aydos Sadykov, qui le laissait tomber, présentant selon Mediapart « le DCK comme une sorte de coquille vide semi-mafieuse, destinée à assurer à Abliazov une crédibilité politique pour échapper à la justice de son pays » …« Une publication d’autant plus embarrassante pour l’ancien directeur de la banque BTA s’il s’avère qu’il négocie effectivement en secret une amnistie pour ses crimes auprès des autorités kazakhs. On a connu des opposants politiques plus offensifs… » Dans une analyse lisible ici sur Kazakhstan 2.0, on accuse Ablaziov de populisme, et rien d’autre : « pour cette raison, Mukhtar Ablyazov commence ses nombreuses adresses Internet et discute avec de vives promesses à différents groupes sociaux kazakhs. Il parle entre autres de salaires élevés et d’autres récompenses que ce dernier recevra après la montée au pouvoir du DCK-2 (Democratic Choice of Kazakhstan (DCK-2). De toute évidence, pour des raisons économiques objectives, il est peu probable qu’il tienne ses promesses, mais cela sera évident dans le cas où il deviendrait effectivement le chef du gouvernement. Compte tenu de tous les autres scénarios, le populisme d’Ablyazov semble être une valeur sûre pour lui. Il faut noter que Mukhtar Ablyazov n’est en aucun cas le premier populisme politique dans sa lutte pour le pouvoir. Dans l’espace post-soviétique, cela a été fait par le président du Kazakhstan et de la Russie, Nursultan Nazarbayev et Vladimir Poutine. Et à l’étranger également, de tels hommes politiques et représentants de l’État ont surgi en grande quantité ces dernières années. Le président américain Donald Trump est le plus célèbre d’entre eux ».
(2) Son travail a été fortement critiqué par un député : « Il est difficile de qualifier cette expérience de complète, car Elena Tichchenko a travaillé pour la Rada pendant un an tout au plus et n’a compté que le reste du temps, résidant à l’étranger. Le député du peuple, Sergey Leshchenko, a déclaré sur sa page facebook. « Présentant Tichchenko, la ministre Arsen Avakov a écrit qu’elle travaillait pour le Comité de la Verkhovna Rada sur la lutte contre le crime organisé et la corruption. Le fait est que je suis membre de ce comité. Dans l’appareil, on ne s’en souvient pas. Plus précisément, ils se souviennent, mais avec un côté très particulier « , – il a cité le poste de Leshchenko » La vérité ukrainienne « . « Mme Tichchenko a été inscrite en tant que fonctionnaire au comité de la Verkhovna Rada de mars 2005 à avril 2014. Cela fait neuf années. À partir de ces neuf années, Tichchenko a vraiment travaillé… moins d’un an. Et pendant les huit années restantes, elle a vécu à Londres, préparant son congé de maternité dans la Verkhovna Rada « , a-t-il ajouté. C’est-à-dire que, selon le député, à partir des neuf ans au service de l’État, Elena Tyshchenko « n’a effectué aucun service dans l’État ». « Et maintenant, elle sera responsable de la coopération avec les services spéciaux occidentaux pour la restitution des avoirs volés. Vous rigolez ? « – a écrit Leshchenko. »
(3) un site ukrainien résume l’ampleur des dégâts : « comme le prouvent les documents ci-dessous (visibles ici), le 10 octobre 2013, Elena Tishchenko a interjeté appel du procureur général de la République du Kazakhstan, A. Daulbaev. A en juger par la date, elle lui a écrit dans un centre de détention provisoire russe. Ci-dessous, nous allons donner un texte intégral de cette lettre, en préservant l’orthographe et la ponctuation de l’auteur, mais peut-être avec quelques inexactitudes, puisque la déclaration a été écrite à la main et n’est pas toujours lisible. Elena Tishchenko a donné de nombreux témoignages. Plus précisément, ce que les employés du Comité de la sécurité nationale (KNB) de la République du Kazakhstan ont présenté avant elle a été signé. De plus, les « témoignages » combinaient tous les résultats de leurs nombreuses années de travail opérationnel, tous les résultats d’écoute illégale et de saisies. C’est-à-dire qu’ils l’ont forcée, dans son témoignage, à légaliser ce dont ils avaient besoin pour attaquer la cause d’Ablyazov lui-même, mais également de ses partisans de l’opposition. Et pour plus de conviction, Elena Tishchenko a été contrainte de raconter tous ses « témoignages » à la caméra. Hormis Ablyazov, Elena Tishchenko a donné le « témoignage » à un très large cercle de personnes, pratiquement toutes intéressées par le KNB. De plus, nous notons qu’elle ne connaissait pas ces personnes personnellement et qu’elle n’y était jamais confrontée, ce qui ne l’empêchait pas de leur donner des caractéristiques négatives, d’interpréter leurs actions et de leur attribuer une motivation. Au Kazakhstan, il existe maintenant une « liste de Tichchenko », des personnes à partir desquelles, en raison de son témoignage, ont été arrêtées ou des poursuites pénales ont été engagées contre elles. Tishchenko et un journaliste et une personnalité publique du Kazakhstan, notamment Irina Savostina, Bolat Atabayev, Muratbek et Bakhytzhan Ketebaev, Irina Petrushova, Bulat Abilov, le prisonnier politique Vladimir Kozlov et son épouse Ali Turusbekov. C’est sur la base de son témoignage concernant la télévision d’opposition indépendante au Kazakhstan qu’une affaire pénale a été ouverte contre le directeur du centre de production « Panorama », Georgy Arkhangelsky. C’est précisément sur la base de son témoignage qu’a été « biffé » dans les affaires pénales le politicien de l’opposition russe, Alexander Potkin. « Dans ce cas de figure, la belle Elena aurait donc été retournée par les russes (et les kazakhs), et aurait mené directement à l’arrestation d’Ablyazov: la voici devenu espionne, alors, en France ! Cela expliquerait beaucoup de choses, dont son étonnant recrutement par un ministre ayant totalement minimisé son enfermement en Russie !
(4) il est objet et ses parents d’une attention fort particulière en tout cas là-bas : « Un autre épisode curieux signalé par des activistes des droits de l’homme qui, s’il est vrai, montre à quel point les services de sécurité semblent aller très loin dans la poursuite du dossier de Yerimbetov. Bakhytzhan Toregozhina, éminente militante des droits de l’homme, a raconté qu’en rencontrant les parents de Yerimbetov dans un café à Almaty en décembre pour discuter de l’affaire, elle avait remarqué un objet étrange caché dans une boîte de serviettes sur la table et avait découvert par la suite qu’il s’agissait d’un appareil d’écoute. Toregozhina a posté des photos de l’article sur sa page Facebook. Quelques jours plus tard, Toregozhina a montré l’appareil aux journalistes lors d’une conférence de presse. Quand une personne dans la pièce, qui s’est présentée comme un blogueur, a insisté pour qu’on lui présente l’objet de plus près, Toregozhina a anxieusement clôturé la conférence de presse. À ce moment, le jeune homme a sauté de son siège, a attrapé l’appareil et est sorti en courant. Le très respecté Bureau international des droits de l’homme et de l’état de droit du Kazakhstan a rendu compte de ce récit »
(5) Méfiance en effet : selon Bartosz Kramek, c’est un site évidemment et encore téléguidé du Kazakhstan ou de Russie, plutôt. Il indique que c’est selon lui « un site pro-Kremlin, dissimulé dans une bulle européenne, qui est 100% anonyme avec de faux followers, un contenu suspect et un logo recopié des armes de la Syrie (dessin comparatif à l’appui, fort surprenant), juste au moment où vous pensiez que les trolls russes devenaient plus intelligents » On notera à sa décharge que le site est récent, qu’il ne contient pas grand-chose et que son serveur et nom de domaine sont enregistrés chez Shinjiru Technology Sdn Bhd, en Malaisie. Un pays d’où proviennent il est vrai beaucoup de sites extrémistes. Ici dans le Nord, ici en France, par exemple, un néo-nazi virulent expédiait ses délires d’un serveur de Malaisie, il y a quelques années. Ici, le ou les gestionnaires du site lui ont répondu directement, précisant qu’ils étaient plusieurs journalistes indépendants alors qu’un seul nom apparaît régulièrement dans le site, celui d’un dénommé Tim Rich. L’un des serveurs relais, Ipchina163.com, a aussi une antenne au Luxembourg. Ces sites disséminent également énormément de « spam » mais ils ne sont pas les seuls. Ici la liste des noms liés à cette adresse. Mais on y trouve aussi par exemple adobeupto.com. ou antifa-nordost.org mais aussi des trucs comme stéroidsdirectUK.com ou wowcure.com, beaucoup plus douteux.
un bon résumé ici sur le cas de Moukhtar Abliazov :
https://www.nouvelobs.com/monde/20141205.OBS7082/moukhtar-abliazov-l-oligarque-kazakh-qui-embarrasse-l-elysee.html
https://cefor.no/globalassets/documents/about-cefor/news/cc-2011-felix-tschudi.pdf
https://thediplomat.com/2018/07/the-case-of-the-khrapunovs/
Le journal citoyen est une tribune. Les opinions qu’on y retrouve sont propres à leurs auteurs.
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