Le Brésil vaste pays, recourt à différents moyens de transport pour véhiculer la coke sur des centaines, voire des milliers de kilomètres. Si l’avion, comme on l’a vu, est un des moyens les plus utilisés, il ne se charge pas de tout le trafic : les camions prennent le relais, pour notamment remonter vers le nord du pays. Si on peut l’imaginer pour les tonnages importants de livraisons de marijuana provenant du pays producteur, le Paraguay, on l’imagine moins pour transférer la coke venue d’avion de ce même Paraguay, relais de la Bolivie en ce cas. C’est ça, ou avoir recours à des appareils plus gros et capables d’effectuer de plus longues distances que les petits Cessna habituels. C’est vers quoi s’acheminent certains trafiquants, comme on va le voir aujourd’hui dans cet épisode.
Le 29 mars 2017, nouvelle affaire. Ou plutôt la reprise d’une ancienne, comme on va le voir. Et un tout autre emplacement d’arrivée pour la coke. C’est à Porto Velho que ça se passe tout d’abord ; dans l’État brésilien du Rondônia, voisin avec… la Bolivie. Là où ça ne fait qu’empirer en fait. Et là où le même manège qu’ailleurs a été observé pendant des semaines par la police avant qu’elle n’intervienne. Un avion a été vu plusieurs fois venant se poser au même endroit sur une piste clandestine.
Le plan habituel, en quelque sorte, rien de nouveau sous le soleil des narcos. Le premier cliché fourni par la police, pris de bien loin, ne nous aide pas vraiment : c’est certes un Cessna, mais lequel ? Le premier qui nous vient à l’esprit, c’est bien entendu celui-ci ici à gauche : un Cessna bien connu : le PT-KCJ (un Cessna 210L (de numéro de série 21060406). Quoique… les filets ont le même design, les mêmes tracés, mais comme ce dernier est standard sur cette série, on ne peut rien conclure à ce stade.
Une fazenda pour recevoir l’avion
C’est bien plus au nord, qu’il se va ensuite se poser, dans une fazenda de Para sur laquelle les policiers ont leurs regards de tournés comme va l’expliquer le délégué Leonardo Marino : « récemment, le principal dirigeant de l’organisation a acquis une ferme avec l’argent de la drogue illicite à la frontière du Pará avec Maranhão, où il a construit une piste d’atterrissage et a également acquis un avion. Avec cela, il ne dépendait pas d’autres groupes et il transportait lui-même de l’État de Rondônia dans cette fazenda où il cachait la drogue dans des tonneaux enterrés le long de la ferme », explique-t-il. Un « narco-indépendant (?), qui se servait d’un… Cessna, bien entendu. Immatriculé PT-IHU (ici à droite). L’avion est enregistré depuis… le 6 juillet 2004 au Brésil, c’est le Cessna 210L (21059695). Il a appartenu à l’organisme Sistel Sistema de Televisao LTDA, mais ne semblait plus capable de voler : son certificat de navigabilité lui avait été retiré. Trop vieux pour faire de la télé, mais encore bon pour apporter régulièrement ses 600 kilos de coke, au grand maximum dans la fazenda du narco-trafiquant !!!
Mais le jour de l’intervention, la police a failli manquer de chance raconte le délégué : « l’approche de l’avion a été faite au moment où il a atterri à la ferme, à Pará. On croyait qu’il serait chargé de narcotiques, mais l’avion a présenté des problèmes mécaniques et il a dû retourner à la ferme avec l’argent qui serait livré aux fournisseurs », a déclaré Marino.
À l’intérieur de l’avion, des agents du FP ont saisi environ 900 000 dollars dans une valise, ainsi que quatre fusils, des munitions, deux pistolets et d’autres objets illicites (photo des armes ici à gauche). On n’avait pas affaire à des débutants. « Tant cette ferme que l’avion et les voitures ont été acquis par les principaux dirigeants et d’autres impliqués dans l’organisation criminelle », a-t-il dit. Ils trouveront quand même sur place 170 kilos de coke. On rappelle qu’on est là carrément au nord du pays (vers Belem, le Maranhão étant à l’est du Para) et que ça signifie aussi que le vieux Cessna avait pas mal de chemin à faire… en venant de Rondonia, situé au Sud Ouest du pays. De Porto Velho à Belem il y a en effet plus de 2540 km en ligne droite !!! Autrement dit, le Cessna emportait moins.
Si l’opération s’avère un succès, les dires du délégué inquiètent plutôt, car selon lui « le nom de l’opération, Retomada, a été donné parce que le groupe criminel avait déjà fait l’objet d’une enquête de la police civile de Porto Velho, en 2016, lors de l’opération Conceição. Selon la PF, certains membres du groupe avaient été libérés, n’avaient pas été identifiés ou étaient prescrits ». Bref, la première n’avait pas été un succès !! On notera que lors de la présentation de la saisie avait été montré un camion… dissimulant des kilos de coke. Ou pire encore…
Un récit dérangeant…
Pire, car on retrouve, hélas, un article sur la première enquête « ratée, ou décrite comme « incomplète » par la police en 2017 . On y lit ceci : « l’organisation criminelle arrêtée pour trafic de drogue jeudi (le 14 juillet 2016) lors de l’opération « Connection MOC » effectuée par la police fédérale de Minas Gerais, Goiás, Espírito Santo et Rondônia, laquelle a découvert un parc de millionnaire qui comprenait des voitures et de l’immobilier et de luxe. Selon la police fédérale (PF), l’un des détenus a acquis en un an et demi, des marchandises d’une valeur de 5 millions $. Les enquêtes ont également indiqué que le gang négociait pour acheter un avion. « Nous avons réalisé une évolution de l’équité, non seulement pour un usage personnel des trafiquants, mais aussi à l’amélioration des activités illicites développées. Nous avons réussi à savoir qu’ils étaient en train de négocier un petit avion avec un potentiel de vol raisonnable, et qui serait utilisé pour le transport plus rapide et des drogues, étant plus efficace « , a déclaré le délégué Thiago Amorim Garcia. L’avion est évalué à 600 mille reais. Au cours de l’exécution des mandats, la police fédérale a saisi trois voitures de luxe, d’une valeur de plus de R 300 milliers $, et plus de 20 000 $ US en espèces. Quatre hommes ont été arrêtés et deux restent fugitifs. Il n’y a pas eu de saisie de drogue pendant l’opération. L’un des prisonniers est Edvar Henrique Guimarães junior, 34 ans, qui purgeait une peine en régime semi-ouvert pour le trafic de drogue dans le Januária. « En 2006, il a essayé de rejoindre l’Académie de la police militaire, mais ils [PM] a fait une enquête et l’ont expulsé à partir de ce moment-là, il a été présent dans le trafic », souligne Amorim. Ils ont également arrrêté Cicero da Silva et Geovani da Silva, qui sont père et fils, et qui vivaient dans Anapolis (GO) pour travailler directement avec les concessionnaires de Rondônia et Aliandro Ribeiro, qui a été arrêté à Vila Velha (ES) en juin 2015. Il avait été arrêté après que le PF ait déclenché sa recherche en déclarant qu’il utilisait de faux documents et que sa voiture prenait régulièrement l’autoroute. Deux hommes restent en fuite ». Or qu’est ce qui illustre l’article ? Une photo de l’avion (de fort mauvaise qualité, désolé), justement, convoité alors par les trafiquants, et « découvert » l’année suivante seulement, selon la police. Voilà qui pose problème ! Les policiers, qui auraient donc révélé le PT-IHU avant même qu’il ne soit choisi par les trafiquants, cela semble en tout cas difficile à imaginer !!! Et pourtant… il semble bien que ce soit le cas, ce qui procure de belles interrogations !!! Pouvait-on afficher avant qu’ils ne le prennent en mains la photo de l’avion des trafiquants ? Ou plutôt pourquoi avoir voulu le faire ?
Avion ET camions
Le récit de la police, à défaut d’être clair, expliquait au moins le principe et le circuit, particulièrement bien rodé comme on va le voir : « Thiago Amorim a déclaré que les enquêtes ont commencé en décembre 2015, après que la PF ait saisi 100 000 reals dans une voiture. L’argent était dans le compartiment secret de la banquette arrière qui se déclenchait avec un bouton après seulement que le conducteur ait démarré la voiture (c’est la photo ici à droite). A l’époque, il y avait un soupçon que le montant provenait de commissions occultes versées par le détournement de fonds publics, mais la recherche a montré que le montant était lié à la livraison de 37 kilos de cocaïne, en fait, à Januária. « Nous avons détecté que les trafiquants Goiás avaient une relation avec le Rondônia, où pourrait être apportée une bonne quantité de drogue qui serait ensuite distribuée dans d’autres Etats, que Minas Gerais », affirme le chef de la FP. La police enquête toujours pour savoir si le gang est lié au trafic international. Une fois qu’ils obtenaient la drogue à Goiás, Edvar Guimarães apportait la drogue pour Montes Claros et Januária dans le nord du Minas Gerais, et les distribuait à d’autres endroits d’Espírito Santo. Généralement, le transport était fait par les autoroutes; dans certains cas, par avion. Thiago Amorim explique que pour arriver à MG et ES, les substances étaient introduites dans des camions avec des compartiments scellés. Trois véhicules d’Edvar ont été saisis. Pour la PF, l’avion en cours de négociation serait utilisé pour étendre l’action des gangs et pour transporter la drogue plus rapidement et en étant moins susceptible d’éveiller les soupçons. «Parce qu’il est petit, l’avion permet des atterrissages sur des pistes improvisées et même sur celles en terre», explique le délégué ». Bref, ils alternaient convoyage par autoroute ou dans les cieux. A croire que le climat influait sur les décisions de livraison !
Des trajets plus longs envisagés ?
Et comme ça ne s’arrête jamais, au Brésil comme ailleurs, on tombe le 31 mars dernier (2018) sur une énième annonce de découverte d’avion litigieux. Mais celui-là est d’emblée à part, car ce n’est pas un Cessna monomoteur à aile haute mais un appareil devenu ces derniers temps plus rare dans ce genre de trafic : un type 401. Un bimoteur 401 pressurisé, capable de monter à 8 000 mètres, et différent également par son allonge (il peut voler 2 145 kilomètres sans essence supplémentaire), mais aussi ses capacités d’emport : il peut emmagasiner près de 900 kilos de charge. Autrement dit un client sérieux, en cas d’usage par des narcos, pour de longs trajets. L’endroit où l’engin s’est posé est décrit comme étant une « fazenda » proche de la BR60. Une route fort intéressante en effet nous rappelle Wikipedia « La BR-060 est une route fédérale du Brésil. Son point de départ se situe à Brasília, la capitale fédérale du pays, et elle s’achève à Bela Vista, dans l’État du Mato Grosso do Sul, à la frontière avec le Paraguay. Elle traverse le District fédéral et les États de Goiás et du Mato Grosso do Sul. » Quand on connaît le principe des vases communicants de coke entre les avions et les camions, longuement étudié et montré ici, on se dit que l’endroit n’a pas été choisi au hasard. L’annonce révélée ici nous indique qu’il a été inspecté par la police dans une hacienda dont le propriétaire s’était plaint à la police de l’arrivée impromptue de l’appareil, venu se poser en fin d’après midi sur la latérite du coin. Venu là sans prévenir, comme beaucoup de ses congénères !
Si déjà son immatriculation (ici à gauche) semble douteuse, avec ses lettrages irréguliers et mal découpés (c’est visiblement un marquage rapporté, avec de l’autocollant, très certainement), c’est davantage encore une photo de son intérieur qui alerte sur ce à quoi il aurait bien pu servir (photo ici à droite).
Car tout l’arrière de la cabine n’est pas muni de ses sièges habituels mais bien de bidons d’essence qui semblent entre eux parcourus par une ligne d’alimentation ; on reconnaît là aussitôt le procédé habituel des vols au long cours des trafiquants de cocaïne !!! Si le cliché n’en révèle que quatre, de bidons, on peut penser qu’il y en a davantage à l’arrière du poste de pilotage. Seuls deux sièges à l’avant demeurent, de l’équipement de départ du Cessna 401, un intérieur qui se présente plutôt d’habitude comme cela en effet. La presse ajoutant « qu’à l’intérieur de l’avion ont été trouvés des bidons, certains remplis, d’autres vides, 4 combinés, une tablette, un Gps »... Bref, la panoplie complète, mainte fois observée ici. On notera les bidons à moitié vides, signifiant que l’avion avait donc effectué plus de 2000 km de parcours… Bref, selon toutes les vraisemblances, l’appareil servait très certainement à un trafic, mais lequel ? On en a une petite indication supplémentaire, l’article indiquant l’usage immodéré de parfum capiteux à l’intérieur de cette même cabine. Un procédé rustique, on le sait, pour tenter de leurrer les chiens renifleurs !!! Bref, malgré ce subterfuge, l’avion sentait en quelque sorte mauvais : il avait tout pour servir de transporteur de drogue !!! Au final, pourtant, aucune personne ne sera arrêtée… bizarre. Encore une étrangeté brésilienne !
Une origine dissimulée… en Floride (encore une fois !)
C’est l’examen qui suit de son enregistrement qui crée davantage de confusion encore. Il existe bien dans les registres un PR-XFR, en effet. C’est le 401A0059, datant de 1969, enregistré aux Etats-Unis sous le préfixe N22AW, répertorié comme appartenant à une personne habitant à Sao Paulo. Le certificat de navigabilité de l’avion ayant été suspendu au 10 juillet 2012. Un cliché pris par le spotter « respi » (Renato Spilimbergo Carvalho) » nous le montre en effet… en fort mauvais état, le 17 juin 2011 à Sao Jose do Rio Preto, la ville devenue lieu de villégiature principal de l’Etat de Sao Paulo, après avoir été la ville du boom du caoutchouc. L’avion a perdu ses deux moteurs, à cette époque. Selon le spotter, il aurait alors été « en maintenance ». On en doute, au départ, mais cinq ans après, un appareil tout neuf apparaît à Penapolis, fraîchement repeint, moteurs à neuf et… toujours la même antenne sur le toit (empruntée semble-t-il à un Beechraft Bonanza, qui lui fait perdre quelques nœuds de vitesse): l’engin a bien meilleure allure, il est devenu entre-temps pleinement brésilien en affichant comme immatriculation… je vous le donne en mille… PR-XFR, bien sûr, mais celui-là avec un lettrage plus respectueux des normes (photo wellington francisco) :
Un avion passé par le Paraguay (quel hasard !)
D’autres clichés du même spotter confirment le design new style qui a été apposé à l’avion. A noter qu’il semble donc avoir été repeint à Penapolis même, l’endroit où avait aussi changé de look le PT-JOA, vu ici avant qu’il ne devienne, à moins d’un clonage, l’avion de notre fameux pilote mennonite endormi (voir l’épisode 22)… Le véritable « XFR » retrouvé, il s’agît maintenant de retrouver notre intrus. Le monde des spotters étant plein de resources et plein d’images, c’est grâce à eux que l’on retrouve l’impétrant. Le voici en effet, photographié le 30 janvier 2011… au Paraguay, portant l’immatriculation américaine N8531C, qui nous renvoie chez la FAA au N° de série 401A0029 : c’est bien lui le faux XFR (même son antenne est cette-fois-ci la bonne ) !!! Un avion dont le certificat de vol a été annulé aux USA au 17 avril 2012, car exporté… au Brésil ! Un engin dont la trace est aussi digne d’un roman policier, puisqu’il a été acquis le 12 février 2011 par une société appelée ALJ Engines Supply Inc pour être donc revendu dans la même année au Brésil. Or l’examen de son dernier acheteur avant l’expédition n’est pas sans surprise.
La société a bien un site, avec une ou deux belles images, mais c’est bel et bien une coquille vide, dont le contact est un simple entrepôt installé à deux pas des pistes de l’aéroport de Miami (on y revient, à la Floride, encore une fois). Un cas de figure déjà vu ici lors de l’examen d’un gros Beechcraft retrouvé au Guyana destiné à transporter de la coke. Une coquille tellement vide qu’elle s’offre des diplômes bien grotesques, tel celui signé d’un obscur « expert », nommé Bob Pina, qui lui, comme « self-employer » habite au Miramar Executive Center, en réalité des bureaux à louer… Rien de cela ne fait sérieux en définitive. L’avion atterri au Brésil est issu d’une coquille complètement vide.
Une drôle d’entreprise de Floride, à l’origine
Selon ALJ, au départ cette fameuse entreprise était un « taxi-aérien », « créée à Miami il y a 28 ans, » le propriétaire actuel précisant que « nous sommes une famille de pilotes », sans plus de précisions. L’homme qui signe s’appelle Adolfo Leonardo, 37 ans, qui oublie semble-il d’énumérer ses autres fonctions de direction au sein d’un bon nombre de sociétés minuscules, dont Air Seas Cargo USA LLC (dont le site n’est plus à jour depuis 2014 alors que la société a été créée en 2013 !) Express Aviation LLC, avec son Facebook d’admirateur d’avions, ou encore « Doctor Cooler USA, LLC » (distributeur de thermos !), entre autres. Tout ceci sent l’esbroufe et la mini-entreprise de façade complète. Sur son site, « ALJ » a apposé un logo sur un bâtiment… grâce à Photoshop : il n’est pas dans l’alignement de la façade du bâtiment !! « ALJ » annonçait pourtant posséder un 727-200 (le N708AA,
ici vendu à 595 500 dollars, le pauvre, il s’était pris un sacré orage en 2006), mais aussi le Cessna Citation II (N89LS). Un Citation devenu… brésilien, en 2012, sous l’immatriculation PR-VIR, vu ici à gauche l’aéroport De Goiânia – Santa Genoveva le 15 mai 2013 (photo Wanderson Pires de Freitas). Bref, beaucoup de vent… mais un souffle qui mène directement au Brésil !
Avion différent et trafic qui s’internationalise
L’arrivée début 2018 d’un avion pas très commun dans le secteur n’est pas une première, à bien regarder. A partir d’octobre 2017, les policiers brésiliens commencent à s’intéresser aux allés et venues d’un avion semblable immatriculé aux Etats-Unis, le N401NA. C’est aussi un Cessna 401, on s’en serait douté à lire son immatriculation explicite, qui circule régulièrement et pas trop discrètement, ou pas assez, sur la piste unique de l’aéroclub de Goiânia, qui est aussi celui de l’aéroport de Goias.
L’appareil appartient à une fort obscure entreprise, « SW Arizona Corp« , enregistrée bien sûr comme Trustee de de Wilmington, une boîte aux lettres de plus. Une boîte aux lettres commune à plein de sociétés, et qui ne possède en revanche que ce seul avion : en somme, elle a été fabriquée spécialement pour lui ! Qui se dissimule vraiment derrière cet avion… mystère ! Tant que Wilmington permettra ces enregistrements anonymes, on ne pourra jamais le savoir ! En tout cas c’est comme le précédent !!!
L’aérodrome de Goiânia, installé en face de l’aéroport de Goias, n’est pas un petit aérodrome de province, loin s’en faut : il héberge presqu’une centaine de hangars à lui tout seul. Autrement dit, un vrai cauchemar à surveiller pour la police locale. L’aéroclub, en prime, est situé sur les bords de la « GO-070 » une autoroute parmi les plus importantes de l’Etat de Goias. Elle traverse les villes de Goianira, Inhumas, Itauçu, Itaberaí, Goiás, Itapirapuã, Jussara, Aparecida de Rio Claro et elle se termine dans la ville d’Aragarças, avec la rivière Araguaia nous disent les guides : bref c’est une route très fréquentée par le tourisme, un flux là aussi difficile à contrôler pour les policiers. L’association possible avion-camions est dans la tête des policiers, ce que confirme une information anonyme. A juste raison : lorsqu’ils investissent le hangar du N401NA, le 20 décembre 2017 et qu’ils commencent à retirer le plancher de l’appareil, bingo : entre les entretoises, il découvrent des pains de coke (ci-dessus à gauche). Il y en a 67 kilos au total.
L’intuition avait été bonne (et le coup de fil de l’extérieur aussi : un très bon tuyau !). Ce qui est encore plus surprenant, ce sont les pilotes qui étaient en train de monter à bord lors du raid policier : ce sont deux jumeaux… espagnols, âgés de 57 ans !!! L’appareil avait obtenu toutes les autorisations pour circuler au Brésil: en somme, il était irréprochable ! A noter que sur l’un des clichés de la police le compartiment à bagages avant du Cessna contient un réservoir supplémentaire blanc, bien visible (ici à droite). On notera aussi au passage que les autorités n’avaient pas divulgué les noms des deux pilotes espagnols… Avec leurs bidons supplémentaires, auraient-il été tentés par une traversée de l’Atlantique ???
Et l’aéroclub qui récidive…
Après l’arrestation de décembre, on se dit que l’aéroclub de Goiânia n’est pas prêt de refaire la une des journaux, ou bien que les trafiquants n’étaient pas près à recommencer au même endroit. C’est oublier les impératifs de la demande, qui semble très forte à cet endroit.
Résultat, le 14 février 2018, un autre avion se fait à nouveau serrer à Goiânia. Cette fois-ci c’est un Piper Seneca II immatriculé PT-RCX. Est alors arrêté un très jeune pilote, Whylason Ribeiro da Silva Neto, âgé de 20 ans seulement (ici à gauche), à qui on a promis 50 000 reals pour effectuer le transport : le gamin vient de voir sa jeunesse bousillée pour… un peu moins de 15 000 dollars, le prix d’une voiture !!! L’avion, qui fait la une du JT local, est celui de Brasil Vida Táxi Aéreo, le 810335, qui a déjà connu trois livrées différentes (ici une vidéo ancienne sur la société, et ses transports médicaux). L’appareil arrêté par la police contenait 150 kilos de pâte de cocaïne.
Selon cette même police, c’est la découverte du premier qui avait mis la puce à l’oreille d’un trafic plus profond et plus organisé que prévu ayant pour fief l’aéroclub ! L’avion était selon l’ANAC en cours de transfert de propriété, l’appareil devant être transféré à son nouveau propriétaire, nommée Glenda Brenna Silva Ribeiro. Son nom apparaît fort étrangement dans une liste d’affiliés brésiliens au PSC, le « parti social chrétien de Taïlandia », une ville du Para !!!! L’ancien, étant selon la police un habitant de Goiania, qui est aussi le « dirigeant d’une entreprise dans la fourniture de services de transport aérien médical et l’affrètement aérien exécutif » selon le communiqué (bref, Brasil Vida Táxi Aéreo, non cité, par crainte de mauvaise publicité sans aucun doute !)
Un dernier vol pour terminer ?
Et puis, on va le voir encore, les petits aéroclubs regorgent d’avions relativement faciles à voler. La tentation est grande pour les trafiquants : souvent isolés des villes, à l’écart, ils ne sont pas spécialement surveillés comme on le sait. Celui de Três Barras pas plus qu’un autre. Il est situé dans l’Etat de Santa Catarina et possède une piste en dur de 1370 mètres de long, c’est un espace de vol qui fonctionne avec un simple accord amiable entre la municipalité et l’Agence nationale de l’aviation civile (ANAC), et
il y a du monde sur place jusque 18H30 selon son gérant, mais après il n’y a pas de sécurité particulière pour les hangars (à part des alarmes classiques bien sûr), et pas davantage d’éclairage nocturne. Si bien qu’au petit matin du 15 mars 2018 (c’est fort récent en effet) un propriétaire de modèle EMB-721D Sertanejo venu de Sao Paulo arrivé sur place deux jours plus tôt, ne l’a pas retrouvé: l’avion avait tout simplement disparu dans la nuit! L’homme est reparti chez lui plutôt dépité on l’imagine… mais en bus. L’avion manifestement volé étant le PT-RYL, visible ici à droite et ici pris en photo par Daniel Popinga en 2013 au Condomínio Aeronáutico Costa Esmeralda de Porto Belo. Le Sertanejo numéro de série 721205 (il doit déjà avoir été poncé à ce stade) avait été enregistré au Brésil dès le 4 mars 2002. Encore un que l’on risque fort de retrouver vautré un jour ou l’autre dans un champ… bourré de sacs de cocaïne ! A moins que l’on ose le mettre en vente discrètement, tous papiers falsifiés bien sûr : on trouve par exemple ce modèle similaire, annoncé à 495.000 – reals (145 000 dollars)...
Un documentaire à voir :
Nota : on peut regarder le reportage TV de 2015 sur la drogue et l’aviation « Exclusivo – Esquema Multimilionário de Drogas », malgré beaucoup de séquences en boucles, façon BFM (hélas) : la connexion Paraguay-Brésil est l’avant-avant dernière séquence. Sont cités au passage
les avions PT-EAA (le N°810001, inexistant au registre brésilien officiel alors que photographié au Manaus Aeroclube de Flores –
en aout 2013 au nom de Girassol Aero Taxi, ce qui montre bien qu’il était en phase de re-décoration, et que les trafiquants savaient plutôt y faire, l’avion en étant à son deuxième relookage, cf ci-dessus), un Piper Seneca ici à gauche en train d’être repeint, le PT-CEJ (Le Cessna 182G 18255650 enregistré le 08 novembre 2011; ex N3150S, le PT-EOV (un Embraer EMB-720C – 720075- enregistré le 13 août 2007, le PT-EXS (ici à droite),
et les pilotes Manuel Maleiro, Oswaldo Muniz (pilote du PT-BRP), Alexandre de Olivieira Junior , celui de l’hélicoptère du politicien brésilien.
Le principal trafiquant cité est un certain Paulo Jones (Flores) dont on aura à reparler ici-même.. c’est sûr ! On notera que le reportage, bien que péniblement monté, nous laisse admirer les appareils saisis et nous montre surtout une organisation parfaite avec hangars à peinture et à entretien sans oublier les trois pompes à kérosène de disponibles (à indice d’octane différent ?)…
Un deuxième reportage est visible ici sur la contrebande électronique (avec le PR-FAV comme avion transporteur) :
Le journal citoyen est une tribune. Les opinions qu’on y retrouve sont propres à leurs auteurs.
Article précédent:
Coke en stock (CCXII) : la découverte et la chute des fournisseurs d’avions (47)